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OUT of SIGHT
Dessin de Bruno Rouyère
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Dans le vestibule, avant d’entrer dans la galerie elle-même, vous vous retrouvez face à la maquette qui la représente. C’est un outil institutionnel commun mais rarement rendu public, car généralement réservé à l’usage du ou de la commissaire et de l’équipe technique. En se penchant au-dessus de cet objet, on peut avoir une vue aérienne de la galerie et des cinq espaces d’exposition. Le recours à un tel modèle constitue une des étapes de la planification et de la préparation concrète d’une exposition : les œuvres d’art miniaturisées et les autres éléments y sont déplacés, les interventions architecturales sont expérimentées, les accès possibles aux espaces et les passages de l’un à l’autre sont étudiés. En tant qu’instrument de projection et de spéculation, la maquette suggère une certaine forme primaire de la galerie et son rôle consiste à soutenir l’institution dans l’examen de son propre espace. Une telle construction à découvert procure une vision complète et simultanée de l’espace d’exposition, qui s’avère tout à fait impossible à obtenir pour les spectateurs.trices une fois entré.e.s dans la galerie.

Levant les yeux de la maquette, vous redevenez un.e visiteur.euse. Votre regard se dirige à l’intérieur et autour de la galerie plutôt que d’y plonger et de la survoler. En tant que visiteur.euse, vous pouvez habituellement circuler librement d’une œuvre à l’autre et d’un espace à l’autre. Dans ce cas-ci, K (Karina) et LG (Lynda Gaudreau) viennent à vous dès que vous entrez dans la galerie. Elles vous accueillent et vous offrent une visite guidée.

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Vous découvrez que l’exposition n’est qu’à demi complétée et que l’œuvre principale est un film inachevé dont K est la protagoniste. Alors que K dirige vos pas dans la galerie, il peut s’avérer qu’en l’absence d’une œuvre achevée, une de vos fonctions en tant que spectateur.trice soit de prendre part à la création cinématographique. Vous suivez un scénario déjà présent dans les œuvres, vous évaluez le montage effectué, vous établissez des liens entre les images et créez des transitions entre les différentes pièces, où des décors ont été montés pour des actions distinctes : une scène où K apparaît, une pièce peinte en noir où sont suspendues des œuvres de la collection permanente et, ailleurs, un laboratoire de photos, un orgue électronique abandonné, ainsi qu’un passage qui donne sur un corridor traversant un des murs. Cette mise en place se complète par quelques interventions architecturales clés : le rétrécissement des cadres de porte, des angles aux lignes nettes peints en noir le long des murs pour fausser la perspective, des bandes sonores changeantes et un éclairage choisi.

En acceptant de participer à la visite, vous êtes du même coup invité.e à actionner la caméra, à donner un cadre provisoire aux scènes manquantes, à tenir compte à la fois des contours flous du projet et des excès de la performance vivante, et à faire progresser le scénario. Parfois, vous examinez la galerie en circulant entre ses murs ou en parcourant une exposition de peintures intégrée dans le décor. À d’autres moments, on vous ramène à une autre forme d’échange en tant que spectateur.trice lorsque la visite guidée par K oscille entre le récit et la danse.

À la fin de votre parcours, vous devez retourner au vestibule, où vous pouvez passer près de la maquette afin de jeter un coup d’œil rétrospectif sur la conception de la galerie.

– Robin Simpson, Coordonnateur, Programmes publics et éducatifs

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BIBLIOGRAPHIE

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Vardac, A. Nicholas. Stage to Screen. New York : B. Blom, 1968.

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Produit avec l’appui du Frederick and Mary Kay Lowy Art Education Fund.

Traduction : André Lamarre

Artiste

Lynda Gaudreau

Lynda Gaudreau mène une carrière chorégraphique internationale depuis plus de vingt ans. Son travail entretient un dialogue permanent avec l’architecture, les arts visuels, le cinéma et la performance. De cette approche résultent une grande diversité de projets et de formes ― œuvre scénique, installation, exposition, concert, film, publication, événement, laboratoire… ― ainsi qu’un vaste éventail de contextes de création et de diffusion ― festivals, théâtres, espaces publics, musées et galeries… Lynda Gaudreau a collaboré avec de nombreux lieux parmi les plus prestigieux de la scène contemporaine dans une quinzaine de pays en Europe, en Amérique et au Moyen-Orient.

Depuis 2003, sa pratique chorégraphique s’est déplacée de la salle de spectacle au « cube blanc » de la galerie d’exposition. Ses recherches transportent les pratiques chorégraphiques dans d’autres disciplines et abordent les questions de la perception de l’espace, de la figure humaine et de l’objet.

Sa plus récente série, intitulée OUT amorcée en 2009, porte sur ce qui n’entre pas dans un système, sur le « misfit », sur la marge et l’excentricité esthétique, politique et sociale.

Cette démarche chorégraphique l’a portée vers de nouvelles formes : l’exposition, en dialogue avec les arts visuels et les collections muséales (Out of Grace, Galerie Leonard & Bina Ellen et M Museum, Montréal et Louvain, 2010 et 2012) ; l’installation, Out of Mies a été présentée à l’Architectural Association (AA) à Londres, du 28 février au 28 mars 2014.

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POINTS DE VUE

Introduction

Alors que OUT of SIGHT propose un récit et une expérience de vision qui suscitent une réflexion sur les marges de la production, ce document rassemble les points de vue de certains des collaborateurs.trices du projet. Ils.elles livrent leurs pensées sur le fait d’être et de penser en dehors (out), sur le choix de l’éclairage pour exposer, dissimuler ou déguiser la galerie, sur les frontières entre le.la spectateur.trice et la performeuse, entre les états de conscience modifiée et les espaces imaginés, et sur le prolongement des images.

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Lynda Gaudreau

Chorégraphe et conceptrice du projet

De tous les processus de création que j’ai vécus une chose demeure : tout ce qui a été vécu avant les présentations est souvent plus vivant que ce qui est montré, mais on ne le présente pas parce qu’on n’a pas encore trouvé la forme, la réponse adéquate. Qu’arriverait-il si on décidait de le faire quand même ? Si on jouait avec tout ça et qu’on laissait la fiction faire son chemin. Ce qui est Out of Sight ici, n’est pas tant ce qui est dehors, que ce qui est bien là, mais qu’on ne montre pas et qu’on laisse dehors.

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Lucie Bazzo

Éclairage

Je pense que mon rôle premier comme conceptrice d’éclairage est de guider le spectateur à travers l’exposition, mais il m’arrive aussi de jouer avec la perception qu’on a d’un lieu. Je me suis amusée à rendre celui-ci plus ludique pour accompagner la proposition de Lynda et Karina. Il m’est apparu que l’utilisation de lampes « maison » apporteraient une couche supplémentaire à la compréhension du parcours proposé par les deux performeuses. J’ai voulu désacraliser le lieu, lui ôter sa blancheur et le côté formel et surtout de donner aux spectateurs le goût de s’attarder dans l’espace.


Conceptrice Lumière depuis 30 ans, Lucie Bazzo a collaboré au cours de sa carrière avec des metteurs en scène de renom tels que Robert Lepage, sans pour autant négliger la relève. Elle a aussi éclairé la danse contemporaine montréalaise, notamment avec Lynda Gaudreau, Crystal Pite, Benoît Lachambre, Hélène Blackburn, Sylvain Émard, pour ne nommer que quelques uns des chorégraphes avec qui elle a travaillé.

Son champs d’action ne se limite pas qu’aux arts de la scène, elle collabore avec des musiciens et vidéographes, sans parler de sa capacité à travailler hors les murs dans des lieux non théâtraux.

Lucie Bazzo crée aussi des installations lumineuses pour le festival Phénomena.

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Karina Iraola

Interprétation

La visite guidée évoque tout de suite un de nos intérêts pendant le processus de recherche concernant le rôle primordial du corps et de la présence des personnes pour changer le statut de ce que l’on voit. Une des questions qui émergeaient lors de nos discussions : de quel corps s’agit-il? Tout au long de la recherche, j’ai été inspirée par le concept de corps paradoxal comme élaboré par les philosophes José Gil et André Lepecki. Selon eux, toutes les personnes agissent dans l’espace comme des créateurs d’un espace fictif, un espace paradoxal, empreint par la subjectivité de chacun. Le corps paradoxal est donc ce corps qui se transforme, se métamorphose, s’efface pour disparaître et déborder de ses frontières. Il expérimente des états de corps, terme utilisé dans le milieu de la danse contemporaine et qui est aussi fondamentalement changement, irréversibilité, instabilité et espace intensifié.


Karina Iraola est une interprète créatrice dans le milieu de la danse contemporaine montréalaise. Elle s’intéresse à la migration des images, leurs survivances, leurs traces dans le corps. La stratégie de la citation et l’échantillonnage d’images, de gestes et de répliques provenant, entre autres, du cinéma, sont souvent des outils avec lesquels elle aime jouer lors de la recherche en création. Elle se forme en danse contemporaine aux Ateliers de danse moderne de Montréal, en flamenco à Montréal et en Espagne, en jeu devant la caméra, micro et théâtre chez René Gagnon formation d’acteur, aux Ateliers Danielle Fichaud, à l’Aria en Corse, ainsi qu’à l’École ProMédia. Elle a dansé et collaborer pour plusieurs créateurs, tels que Rae Bowhay, Pierre Lecours, Patricia Iraola, Manon Oligny, David Pressault, Lynda Gaudreau, Brice Noeser, Lara Kramer, pour la compagnie Mandala Sitù, Aurélie Pédron, Amélie Rajotte, le dramaturge et metteur en scène Hanna Abd El Nour, Andrée Martin et Thierry Huard. Elle a aussi travaillé plusieurs années, à titre de chorégraphe, danseuse et comédienne, au sein de la compagnie Le Moulin à Musique qui crée des spectacles de musique contemporaine pour jeune public.

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Annie Lebel

Collaboration à la scénographie

Le noir gomme l’espace. Il crée une architecture perceptuelle qui demeure potentielle ; une architecture qu’on imagine mais qui n’existe pas.


Annie Lebel est architecte et cofondatrice de l’Atelier In Situ, Montréal

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Alexandre St-Onge

Conception sonore

Être ce n’est pas nécessairement être perçu. Ce qui est occulté, telle cette formule de Berkeley à travers son détournement, résiste discrètement à la médiocrité socioculturelle par le simple fait d’exister en dehors de la perception sur les choses. Toutefois, la perception transforme davantage qu’elle saisit et exacerbe ainsi l’insaisissabilité de ce qui est perçu en tant qu’origine toujours déjà perdue. L’origine devient ce qu’elle est : insaisissable. Je pense que de considérer ce qui est hors champ, que ce soit les choses imperceptibles ou l’insaisissabilité de l’origine, est un impératif éthique et psychédélique dans la mesure où rien n’est plus pragmatiquement efficace que de se concentrer sur les effets de ce rapport transformateur et halluciné aux choses ainsi qu’assumer l’insaisissabilité de toutes causes.


Alexandre St-Onge est artiste audio, musicien/improvisateur (basse, voix et électroniques) ainsi que performeur sonore. Docteur (PhD) en études et pratiques des arts (UQÀM, 2015), il est fasciné par la créativité en tant qu’approche pragmatique de l’insaisissable et a publié plus de dix œuvres solos dont : Créatures hermétiques dans mon char bb des otages inaperçus (Grillage Absolu), Cône en tête C Ça KC l’arme chaude de l’ivresse (Grillage Absolu), Nude de chose de même (Le laps), VUEIEN (Errant Bodies Press), Semblances (Avatar), viorupeeeeihean (Oral) et Kasi Naigo (squintfuckerpress). Il a fondé squintfuckerpress avec Christof Migone et il joue dans plusieurs groupes musicaux avec lesquels il a créé plusieurs disques : Klaxon Gueule, Shalabi Effect, Les esprits frappeurs, Pink Saliva, mineminemine, et sans, undo et K.A.N.T.N.A.G.A.N.O. Comme concepteur sonore il a travaillé avec la compagnie d’art médiatique et interdisciplinaire kondition pluriel ainsi que les artistes Marie Brassard, Karine Denault, Lynda Gaudreau, Line Nault, Jérémie Niel, Maryse Poulin et Mariko Tanabe.

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Martin Tétreault

Collection de tableaux

Marcher, glaner, connecter. L’atelier devient mobile. Il se déplace dans les brocantes, obsédé de peintures et de pochettes de disques de paysages. De retour à la maison le travail d’observation de la nature se raffine. En faire le moins possible pour connecter la peinture et la photo. Un élément graphique suffit. L’eau du fleuve St Laurent juxtapose celle de la mer Égée dans un travelling fixe qui se déploie dans l’imaginaire. L’espace est à la fois infime et gigantesque. La peinture, la photographie, le cinéma réunis à l’insu de leurs auteurs.


Platiniste, improvisateur, concepteur sonore et plasticien, le montréalais Martin Tétreault réalise des performances sonores avec des tourne-disques fabriqués ou adaptés par ses soins. Il a ainsi participé à de nombreux festivals et manifestations d’art sonore et d’arts médiatiques tant au Québec qu’à l’international. Il est associé à de nombreux projets en musique, danse, poésie, installation et performance. Il a publié plus de 50 disques avec des artistes du Québec et de l’extérieur. En 2004 à la demande de la chorégraphe Lynda Gaudreau, il met au point un système de notation musicale et de surfaces à jouer qui l’amène à mettre sur pied le Quatuor de tourne-disques qui donne des spectacles et endisque Points, lignes avec haut-parleurs sur le label ORAL. Cette affinité pour la danse se poursuit avec de récentes créations pour Le chant des sirènes, de Sylvain Émard Danse, et 9, d’Hélène Blackburn pour Cas public. En 2015 la commissaire Nicole Gingras publiait Des disques et un couteau, une monographie documentant son travail de plasticien.

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EXPLOREZ

La discontinuité

Comment la forme cinématographique peut créer des liens entre des éléments discontinus et comment ce processus peut faire l’objet d’un prolongement et d’une chorégraphie dans l’espace de la galerie.

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Le vivant et le fragmentaire

L’entrelacement narratif qui s’opère entre la performance réalisée dans la galerie et les coupures dans le film inachevé.

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La complétion de l’image

Comment les images peuvent provisoirement se relier les unes aux autres à travers la vidéo, la performance et l’exposition.

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L’acte de visiter

Les rôles qu’adopte le.la visiteur.euse en adoptant une vision libre et aléatoire, en suivant une visite guidée ou en présence d’une performeuse.

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La galerie comme matière première

Comment la galerie se met elle-même en scène à travers la maquette, les interventions architecturales, l’éclairage, la documentation du processus de production et la présentation de la collection.

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