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QUI PARLE ? / WHO SPEAKS?
Isabelle Pauwels ,000,, 2016. Captation d’image extraite de la vidéo. Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
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Pour l’exposition Qui parle ? / Who Speaks?, la commissaire de recherche Max Stern, Katrie Chagnon, a rassemblé des œuvres réalisées par sept artistes et récemment acquises par la Galerie. Dans cet ensemble, Chagnon a identifié plusieurs questionnements relatifs au sujet parlant. Jo-Anne Balcaen et Raymond Boisjoly abordent cette question à travers leurs réflexions respectives sur la présentation et la construction de la figure de l’artiste. Pratiquant l’association libre, Moyra Davey rend compte de cinq ans de psychanalyse dans une œuvre qui reproduit approximativement la durée habituelle d’une séance d’analyse. Suzy Lake étudie, à travers la photographie, les codes sociaux et les frontières changeantes qui conditionnent l’image de soi. Isabelle Pauwels traite du babillage quotidien sous la contrainte du capital, que la personne qui parle tente de faire contre mauvaise fortune bon cœur ou qu’elle y ait cédé et s’en réjouisse. Krista Belle Stewart se penche sur les différentes façons par lesquelles l’expérience se transmet par le récit ou le témoignage. Enfin, Ian Wallace présente un dispositif destiné à la dissection de la presse grand public.

Chaque nouvelle acquisition s’appuie en partie sur une recherche visant à déterminer comment ces nouvelles œuvres peuvent correspondre à l’historique de la programmation de la Galerie et à son orientation curatoriale. Cette année, l’acquisition d’œuvres de Boisjoly et de Stewart témoigne aussi d’une volonté d’augmenter le nombre d’œuvres d’artistes autochtones dans la collection. De plus, au cours des quinze dernières années, la programmation de la Galerie a été ponctuée par des réflexions critiques sur la collection et sur le processus d’acquisition : voir, entre autres, les expositions This is Montreal! en 2008, As much as possible given the time and space allotted en 2009 et Collecting: The Inflections of a Practice en 2010.

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Quant à Qui parle ? / Who Speaks?, elle présente dans l’espace d’exposition des documents relatifs au processus d’acquisition, invitant les visiteurs.euses à réfléchir à la mission de collectionnement de l’institution, ainsi qu’au cadre textuel et discursif qui accompagne l’achat d’une œuvre. Dans son essai accompagnant l’exposition, Katrie Chagnon met en lumière cette stratégie qui applique en effet la question de l’énonciation (Qui parle ?) à la fois aux œuvres et à l’institution.

Cet exercice de lecture parallèle et l’étude du travail discursif de l’institution s’approfondit ici, dans Pistes de réflexion. Chaque nouvelle acquisition s’accompagne d’un Justificatif d’acquisition, présenté au comité et inclus au dossier de l’œuvre sous la forme d’un document imprimé. Ces textes situent les œuvres dans la démarche de l’artiste, résument leur historique d’exposition et défendent la pertinence de leur inclusion dans la collection en relation avec la programmation de la galerie et l’état actuel de la collection. D’abord destinés au comité, ces textes furent plus tard retravaillés et condensés pour la section de la collection sur le site web de la Galerie.

Les textes présentés ici dialoguent avec l’essai qui accompagne l’exposition, prenant comme point de départ la question posée par le titre de l’exposition et ses concepts directeurs. Les lecteur.rice.s sont encouragé.e.s à lire tous les textes – l’essai de la commissaire, les propositions d’acquisition et les présentes notes – en étant attentifs aux variations de style des discours selon le contexte dans lequel ils ont été produits.

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BIBLIOGRAPHIE

Agamben, Giorgio. « L’auteur comme geste ». Dans Profanations, traduit par Martin Rueff, 77-93. Paris : Rivages poche / Petite Bibliothèque, 2005.

Alcoff, Linda. « The Problem of Speaking for Others ». Cultural Critique, no 20 (hiver 1991-1992) : 5-32.

Austin, J. L. Quand dire, c’est faire. Traduit par Gilles Lane. Paris : Éditions du Seuil, 1970.

Barthes, Roland. « La mort de l’auteur ». Dans Le bruissement de la langue, 61-67. Paris : Éditions du Seuil, 1984.

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Butler, Judith. Le pouvoir des mots : discours de haine et politique du performatif. Traduit par Charlotte Nordmann. Paris : Éditions Amsterdam, 2009.

Butler, Judith. « Giving an Account of Oneself ». Diacritics 13, no 4 (hiver 2001) : 22-40.

Capitaine, Brieg et Karine Vanthuyne. Through Testimony: Reframing Residential Schools in the Age of Reconciliation. Vancouver : UBC Press, 2017.

Cavero, Adriana. For More than One Voice: Toward a Philosophy of Vocal Expression. Traduit par Paul A. Kottman. Stanford : Stanford University Press, 2005.

Deleuze, Gilles et Michel Foucault. « Les intellectuels et le pouvoir ». Dans Michel Foucault, Dits et écrits II : 1976-1979. Sous la direction de Daniel Defert et François Ewald avec la collaboration de Jaques Lagrange, texte no 106, 306-316. Paris : Gallimard, 1994.

Deren, Maya. Divine Horsemen: The Living Gods of Haiti. New Paltz, New York : McPherson, 1983.

Derrida, Jacques. La voix et le phénomène : introduction au problème du signe dans la phénoménologie de Hussserl. Paris : Presses universitaires de France, 1972.

Felman, Shoshana et Dori Laub. Testimony: Crises of Witnessing in Literature, psychoanalysis, and history. New York : Routledge, 1992.

Foucault, Michel. « Qu’est-ce qu’un auteur ? » (1969). Dans Dits et écrits I : 1954-1969. Sous la direction de Daniel Defert et François Ewald avec la collaboration de Jacques Lagrange, 789-820. Paris : Gallimard, 1994.

Lacan, Jacques. « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse » (Rapport du Congrès de Rome, septembre 1953). Dans Écrits, 237-322. Paris : Éditions du Seuil, 1966.

Owens, Craig. « The Discourse of Others : Feminists and Postmodernism (1983) ». Dans The Art of Art History: A Critical Anthology, sous la direction de Donald Preziosi, 335-351. Oxford : Oxford University Press, 2009.

Preziosi, Donald (dir.). « Authorship and Identity ». Dans The Art of Art History: A Critical Anthology. 317-401. Oxford : Oxford University Press, 2009.

Spivak, Gayatri Chakravorty. Les subalternes peuvent-elles parler ?. Traduit par Jérôme Vidal. Paris : Éditions Amsterdam, 2009.

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Annotations de la sous-section Artistes et œuvres par Chris Gismondi (Stagiaire curatorial 2018) et Robin Simpson (Coordonnateur, Programmes publics et éducatifs)

Traduction : André Lamarre et Ginette Jubinville

Produit avec l’appui du Frederick and Mary Kay Lowy Art Education Fund.

ESSAI

Les ambivalences du sujet parlant, par Katrie Chagnon

Une collection d’œuvres d’art, comme une exposition, est constituée d’un enchevêtrement de voix dont l’identité, le statut, l’autorité et les modalités d’énonciation demeurent à maints égards ambigus, voire occultés. Poser la question qui parle ? dans le contexte d’une présentation intégrale des plus récentes acquisitions de la Galerie ne vise pourtant pas à dissiper cette ambiguïté constitutive, encore moins à dévoiler ou rendre totalement transparent un processus décisionnel qui, étant encadré par des politiques institutionnelles strictes et soumis à des règles d’éthique et de déontologie muséale, exige d’être maintenu en grande partie confidentiel1. En adoptant ici une approche résolument interrogative, il s’agit plutôt d’expliciter une problématique du sujet parlant qui s’est révélée, en aval du processus d’acquisition, inhérente à l’ensemble des œuvres sélectionnées – ce qui, par le fait même, nous invite à reconsidérer les discours justifiant leur présence au sein de l’institution –, tout en permettant à différentes compréhensions de cette problématique de cohabiter dans l’espace physique et discursif de l’exposition.

[…]

– Katrie Chagnon

  1. À un certain moment durant l’élaboration de ce projet, il a été question de rendre public le procès-verbal ou l’enregistrement audio de la réunion du comité d’acquisition en tant qu’élément expositionnel. Cette possibilité a fait l’objet de longues discussions avec la direction de la Galerie et les membres du comité, lesquelles ont révélé les nombreux problèmes que posait une telle démarche. Nous avons donc décidé d’abandonner cette idée.

L’intégralité de l’essai écrit par Katrie Chagnon peut être lue et téléchargée dans la section Textes et documents de ce site. Une version imprimée est également disponible en galerie.

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ARTISTES ET ŒUVRES

Jo-Anne Balcaen

Née au Manitoba en 1971, Jo-Anne Balcaen a fait ses études en arts plastiques à l’Université du Manitoba, à Winnipeg, et à l’Université Concordia, à Montréal. Sa pratique touche plusieurs médiums, y compris la vidéo, le son, la sculpture, les multiples, la photo et l’art imprimé, et se penche sur ses propres expériences en tant qu’artiste et travailleuse culturelle, et sur les facettes cachées de la psyché de l’artiste. Son travail a été présenté à travers le Canada et à l’étranger. Parmi ses expositions récentes on compte The Artist Should Have Value (The New Gallery, Calgary), Kids these days (Kamloops Art Gallery), Let’s be open about… l’art conceptual (Dazibao, Montréal), et Just Cause: Bad Faith – Art Workers’ Activism and Organizing in NYC and Beyond (Interference Archive, Brooklyn, NY). Elle est récipiente de plusieurs bourses du CALQ et du Conseil des arts du Canada, incluant une résidence au International Studio and Curatorial Program, à Brooklyn, New York. Elle vit à Montréal.

ŒUVRE

Mount Rundle, 2014
Vidéo, couleur, son, 3 min 42 s
Édition 1/5

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Achat, 2017 (017.04)

Focalisant la caméra sur un paysage qu’elle a peint à l’âge de douze ans, Jo-Anne Balcaen raconte à la deuxième personne deux moments de doute concernant sa propre capacité à performer et se réaliser en tant qu’artiste.

Alors que la caméra parcourt la surface de la peinture pour examiner les arbres, la rivière et la montagne, Balcaen cherche sa touche personnelle parmi les coups de pinceau. Elle se rappelle comment un pin mal rendu a été complété avec l’aide de la professeure. Un sentiment d’échec qu’elle a, de son propre chef, momentanément estompé par le rendu d’un brouillard au pied de la montagne.

Ce germe de honte nous transporte ensuite, vingt ans plus tard, jusqu’aux vues perspectives montagneuses du Parc national de Banff telles que rencontrées lors d’une résidence d’artiste au Centre Banff. Alors que dans la première moitié, la peinture de l’enfance est encadrée comme un artéfact de l’anxiété, elle devient, dans la seconde partie, le décor et l’arrière-plan émotif d’une résidence d’artiste improductive.

À l’intérieur de ce cycle de l’insécurité, l’esprit tranchant de Balcaen produit un récit qui rompt avec le discours jubilatoire de l’institution dans son utopie de créativité débridée et avec les rituels et le bavardage du monde de l’art de ses collègues artistes. Interpellé.e à la deuxième personne (« you »), le.la spectateur.rice est emporté.e dans le récit de Balcaen et en porte le poids. En outre, le tutoiement de Balcaen s’adresse aux autres artistes. La peinture devient par conséquent un espace de projection partagé, non seulement un lieu réservé aux artistes pour qu’ils puissent s’apitoyer sur l’anxiété généralisée de bas niveau (« low grade generalized anxiety ») suscitée par leur échec à produire, mais aussi pour qu’ils.elles apprécient l’humour grinçant de ce sentiment une fois levé le voile sur l’artiste discipliné.e.

RS

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  • Comment une institution, à travers son discours officiel ou ses interventions, tente-t-elle de prescrire la conduite de l’artiste ?
  • Dans le récit de Balcaen, portez attention à la description des états émotifs et remarquez comment ils contribuent à transformer un récit autobiographique en une adresse ouverte et impersonnelle.

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS

Site Web de l’artiste <http://www.joannebalcaen.ca/>

Chan, Zoe. « What’s going on? (On art, aura, and anecdotes) ». Essai de l’exposition, Jo-Anne Balcaen, The Artist Should Have Value, The New Gallery, Calgary, 4 novembre – 17 décembre, 2016. <http://www.thenewgallery.org/the-artist-should-have-value/ >

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Raymond Boisjoly

Raymond Boisjoly (né 1981, Langley, Colombie Britanique, Canada) vit et travaille à Vancouver. Il est membre de la Première nation des Haïdas. Son travail a récemment été presenté dans des expositions solo au Catriona Jeffries, Vancouver (2016); Over a Distance Between One and Many, Koffler Gallery, Toronto (2015); « From age to age, as its shape slowly unravelled…”, VOX, Montreal (2015); Interlocutions, Carleton University Art Gallery, Ottawa (2014); Station to Station, Platform Centre for Photographic + Digital Arts, Winnipeg (2014); (And) Other Echoes, Simon Fraser University Gallery, Burnaby, BC (2013). Il a participé à nombreuses expositions collectives, notamment In Dialogue, coordonné par Art Museum, Université Toronto (exposition itinérante au Canada, 2017-2018); N. Vancouver, The Polygon Gallery, North Vancouver (2017); Down To Write You This Poem Sat, Oakville Galleries, Oakville, ON (2016), Moucharabieh, Triangle France, Marseille (2015); Unsettled Landscapes, SITElines: New Perspectives on Art of the Americas, Santa Fe, NM (2014); L’avenir (looking forward), La Biennale de Montréal (2014); The Militant Image: Picturing What is Already Going On, or the Poetics of the Militant Image, Camera Austria, Vienna (2014); Pleinairism, Walter Philips Gallery, Banff (2012); Tools for Conviviality, The Power Plant Contemporary Art Gallery, Toronto (2012); Devouring Time, Western Bridge, Seattle (2012); Phantasmagoria, Presentation House Gallery, North Vancouver (2012). En 2016, il a remporté le Prix VIVA de la Jack and Doris Shadbolt Foundation, Vancouver. Il est représenté par la Catriona Jeffries Gallery, à Vancouver.

ŒUVRE

Author’s Preface, 2015
Installation, 25 impressions à jet d’encre et colle à papier peint, 400 x 1 118 cm

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Achat, 2017 (017.05)

La pratique de Raymond Boisjoly déjoue volontairement les attentes des spectateurs.trices concernant la voie que devrait emprunter un artiste autochtone pour rendre compte de son identité et de son savoir culturel. Travaillant avec des textes masqués et manipulant des couches de technologie numérique, Boisjoly accueille les ambiguïtés et les incertitudes qui émergent des zones périphériques et des rencontres entre les sites, les images et les médias passés sous silence. Sa propre voix s’immisce à travers des couches de références culturelles, déplaçant la notion d’auteur. Dans Author’s Preface, Boisjoly utilise comme matériaux le livre et le film Divine Horsemen: The Living Gods of Haiti de la cinéaste Maya Deren. Dans sa préface, Deren commence en décrivant les dix-huit bagages qu’elle a apportés avec elle en Haïti en 1947, dans le but de produire un film sur les rituels vaudous grâce à une bourse de la Fondation Guggenheim. La critique culturel Irit Rogoff considère qu’un bagage est essentiellement rempli des attentes du voyageur ou de la voyageuse, avec ses idées préconçues de ce qui arrivera1. Or, Deren révèle comment le projet s’est modifié dès son arrivée en Haïti, expliquant les circonstances et les événements qui l’ont amenée à abandonner son intention initiale de produire un film d’art, pour le remplacer par un documentaire ethnographique sur les cérémonies vaudous :

Ce n’est qu’après avoir complètement reconnu mon échec en tant qu’artiste – mon inaptitude à conformer la matière à l’image de mon intention – que j’ai réalisé l’ambivalence des conséquences de cet échec, car, en effet, les raisons et la nature de mon échec étaient tout autant porteuses, simultanément, des raisons et de la nature de forces de la réussite2.

En analysant l’intention artistique et les présupposés de l’auteur.e, Boisjoly joue avec la perspective et les déséquilibres explicites de pouvoir inhérents à la rencontre ethnographique et à sa documentation subséquente. Ses textes cryptés, rédigés dans un logiciel de graphisme pour accentuer leur caractère visuel, retransmettent le savoir tiré du texte de Deren et de la réévaluation qu’elle fait de ses intentions et de ses attentes. Évitant soigneusement d’atteindre à l’intégrité du film, il choisit plutôt d’installer un iPad – où joue le film de Deren tel que trouvé sur YouTube – sur un numériseur de façon à capter les images d’accompagnement. Cette attention portée à toute interférence, à toute attente et à toute réception, si minime soient-elles, témoigne d’une méthode de création artistique et de recherche qui suscite une réévaluation du résultat, ramenant l’artiste à son point de départ pour formuler une nouvelle hypothèse. Les attentes sont essentiellement chargées de souhaits et de désirs. Reliées à la spiritualité, ces croyances peuvent constituer un savoir qui permet de rêver et d’imaginer une issue. Pour l’artiste, la rupture des attentes se fait dans une position respectueuse et consciente de sa vulnérabilité. Elle engendre une ouverture, un lâcher prise qui laisse le contrôle au matériau, provoque un retour au point de départ ainsi qu’un changement de direction.

CG

  1. Irit Rogoff, « Luggage », Terra Inferma: Geography’s Visual Culture, London/New York : Routledge, 2000, 36-72.
  2. Maya Deren, Divine Horsemen: The Living Gods of Haiti, New Paltz : McPherson, 1983, 6 [traduction libre].

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  • Le processus de production des images dans l’œuvre. Comment une nouvelle image émerge non à travers une intervention, mais par l’établissement d’une correspondance entre médias.
  • Identifiez les différentes façons dont Boisjoly, Pauwels et Davey travaillent avec la citation, la citation déformée et la paraphrase.

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS

Raymond Boisjoly en conversation avec Marcia Crosby, Simon Fraser University, Vancouver, 16 mai 2013 <https://www.youtube.com/watch?v=dHP6Hed7wcw>

McKee, Jesse. « In Front of One’s Nose: Raymond Boisjoly and the Art of Learning ». Canadian Art (Automne 2015) : 108-113. <https://catrionajeffries.com/wp-content/uploads/press/boisjoly-mckee_canart_2015.pdf>

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Moyra Davey

Moyra Davey est une artiste qui vit à New York dont le travail couvre les champs de la photographie, du film et de l’écriture. En plus de sa longue pratique photographique entamée à la fin des années 1970, elle a produit plusieurs œuvres filmiques et, tout récemment, Wedding Loop (2017), dans le cadre de sa contribution à documenta 14 à Athènes. Elle est l’auteure de nombreuses publications, dont Burn the Diaries et The Problem of Reading. Elle est aussi l’éditrice de Mother Reader: Essential Writings on Motherhood. Des institutions lui ont consacré d’importantes expositions individuelles : entre autres, le Portikus, à Frankfurt/Main (en 2017), la Bergen Kunsthall, en Norvège (en 2016), le Camden Arts Centre, à Londres (en 2014), la Kunsthalle de Bâle (en 2010) et le Fogg Art Museum de l’Université Harvard, à Cambridge, au Massachussets (en 2008). On trouve de ses œuvres dans d’importantes collections publiques, dont le Museum of Modern Art et le Metropolitan Museum of Art à New York, ainsi que le Tate Modern de Londres. On lui a octroyé le Anonymous was a Woman Award en 2004.

ŒUVRE

Fifty Minutes, 2006
Vidéo, son, 50 min
Édition 1/5

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Achat, 2017 (017.06)

Comment se décrire soi-même ? Qu’est-ce qui excède un tel compte rendu ? Où devons-nous situer et chercher le sujet parlant ? La psychanalyse positionne le langage comme le véhicule à travers lequel émerge l’inconscient. À l’écoute des associations libres de l’analysant.e, parfois appelé.e patient.e ou client.e, l’analyste relie les contradictions et les lapsus, tentant d’identifier, de suivre à la trace et de dénouer les conflits qui produisent les symptômes de l’analysant.e.

Dans Fifty Minutes, l’acte d’écouter est loin d’être aveugle. Assemblant des vignettes scénarisées dans une séquence qui correspond à la durée habituelle d’une séance d’analyse, Davey transpose son monologue en langage visuel. Assise devant la caméra ou la tenant à la main, elle tourne les pages d’albums photos, arpente l’appartement, dépoussière les livres, fait le tri de notes, de reçus et de sa correspondance, se balade dans un marché aux puces. Elle enregistre son chien. Son fils est assis à l’arrière-plan. Son conjoint l’assiste à la caméra. Dans des séquences de type essayistique, elle tourne la caméra vers ses livres, parcourant les pages et les notes tout en lisant ses citations à haute voix.

Suivant un scénario, les nuances ou les variations de ton de son élocution laissent place à la concentration nécessaire au souvenir et à la récitation. Bien que le sujet analytique soit noué dans le langage, Davey enlève les œillères de l’analyse et invite le.la spectateur.rice à scruter l’arrière-plan de l’énonciation dans le but de prendre en compte les contingences, le fouillis et les excès de la vie quotidienne et domestique.

RS

EXPLOREZ

  • La voix et le contenu. Comment différents comptes rendus, récits et textes sont assemblés dans un monologue.
  • Comparez l’usage de la photographie et de la narration chez Davey à la combinaison de photos et de textes chez Lake.

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS

Davey, Moyra. The Problem of Reading. Montpelier, VT : Vermont College, 2003. <http://74.220.219.113/~murraygu/wp-content/uploads/2012/02/Problem-of-Reading03.pdf>

– – – – -. « Fifty Minutes: Video Transcript  ». Dans Long Life Cool White: Photographs and Essays by Moyra Davey, 121-141. New Haven : Yale University Press, 2008. <http://imagineallthepeople.info/Davey_FiftyMinutes>

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Suzy Lake

Née et élevée à Détroit, Suzy Lake a immigré au Canada en 1968. Elle a cofondé le centre d’artistes Véhicule Art Inc. (Montréal) et, plus tard, la Toronto Photographers Workshop Gallery (Toronto). Ses premières œuvres ont été présentées dans plusieurs expositions conceptuelles et féministes historiques, telles que Wack! Art and the Feminist Revolution (LA MoCA, Los Angeles, Californie), Identity Theft: Eleanor Antin, Lynne Hershman and Suzy Lake (SMMoA, Santa Monica, Californie) et Trafic: l’art conceptuel au Canada 1965-1980. En 2008, Suzy Lake a pris sa retraite en tant que professeure pour se concentrer à temps plein sur sa pratique. En 2014, sa carrière a fait l’objet d’une importante rétrospective, Introducing Suzy Lake, présentée au Musée des beaux-arts de l’Ontario. En 2016, elle a obtenu le Prix du Gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques ainsi que le Prix de photographie Banque Scotia.

ŒUVRES

On Stage #1 (Bank Pose), 1974/2013, de la série On Stage
Épreuves à développement chromogène, 60,96 x 50,8 cm
Éditions 2/10

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Don, 2017 (017.02.01)

On Stage #2 (Miss Montreal), 1974/2013, de la série On Stage
Épreuves à développement chromogène, 60,96 x 50,8 cm
Éditions 2/10

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Don, 2017 (017.02.02)

On Stage #3 (Grade 1), 1974/2013, de la série On Stage
Épreuves à développement chromogène, 60,96 x 50,8 cm
Éditions 2/10

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Don, 2017 (017.02.03)

On Stage #4 (Accordion Pose), 1974/2013, de la série On Stage
Épreuves à développement chromogène, 60,96 x 50,8 cm
Éditions 2/10

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Don, 2017 (017.02.04)

Maquette: Suzy Lake as Françoise Sullivan, 1974/2012, de la série Transformations
Épreuve numérique de qualité archive, 82 x 97 cm (encadrée)
Édition 1/3

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Achat, 2017 (017.01)

Approcher le travail de Suzy Lake par la question « Qui parle ? » en suscite immédiatement une autre : « Où commence la définition du moi ? » Ceci se lit en français dans On Stage #3 (Grade 1) et en anglais dans On Stage #4 (Accordion Pose), deux œuvres d’une série qui associe des photographies mettant en scène l’artiste ainsi que des photos de sa jeunesse à des textes bilingues portant sur les forces sociales, politiques et interpersonnelles qui modèlent l’identité. Revisitant les conventions du spectacle et de la publicité de mode propre aux médias de masse, et jetant un regard autoréflexif sur les rituels sociaux de l’enfance et de l’adolescence, Lake propose une étude nuancée de l’identité conçue comme un état instable, changeant et pluriel. Cette analyse est réalisée à différentes échelles, de la représentation des femmes dans les médias de masse à la performance et au conditionnement du genre dans les sphères publiques et privées, jusqu’à l’incidence détaillée et ambiante de l’émotion, de l’interaction interpersonnelle et de l’environnement.

La question que pose Lake, à savoir où commence une réflexion sur l’identité, est particulièrement éloquente pour le milieu et la fin des années 1970. Se situant au cœur du féminisme de la deuxième vague, les pratiques ont investi les questions de la représentation de soi et de l’autodétermination, confrontées à la domination de la culture masculine blanche. De plus, ces réflexions se sont traduites en actions rejetant les limites patriarcales dans le milieu de l’art et ont ainsi contribué à développer, à garantir et à agrandir l’espace et les réseaux de soutien aux femmes artistes et aux pratiques féministes. Par conséquent, le de la question de Lake ne se limite pas à déterminer le lieu où l’identité peut être trouvée et analysée; elle cherche aussi l’espace, le contexte politique, l’état d’esprit et le point de vue nécessaires à la poursuite de cette recherche.

RS

EXPLOREZ

  • Dans ces œuvres, Lake utilise, manipule et fait référence à trois types de photographies : la photographie commerciale de mode, les clichés quotidiens et le portrait. Comment chacun de ces types conditionne-t-il l’identité ?
  • Comment lire les légendes lorsqu’on les associe aux photographies vernaculaires et, alternativement, aux mises en scène photographiques ?

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS

Site web de l’artiste <http://www.suzylake.ca/>

Uhlyarik, Georgiana, ed. Introducing Suzy Lake. Toronto : Art Gallery of Ontario, 2014.

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Isabelle Pauwels

Isabelle Pauwels travaille à Montréal, principalement en vidéo et en installation. Son travail relève à la fois de la performance et du réalisme documentaire.

ŒUVRE

,000,, 2016
Vidéo haute définition, couleur, son, 58 min 30 s
Édition 1/2

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Achat, 2017 (017.07)

Ce qui peut ultimement être entendu dans ,000, est l’expression du désir, désir qui transite à travers le babillage du capitalisme, de la vie professionnelle, du travail temporaire, des appétits de consommation et de la publicité commerciale. Les voix de certain.e.s des protagonistes, telle celle de la dominatrice Bijou Steal, sont situées au premier plan et identifiées, alors que d’autres restent collectives et surgissent de l’arrière-plan. Le générique de la vidéo inclut des figures hétérogènes – les Critiques (The Critics), la Fille d’à côté (The Girl Next Door), En bas de la rue (Down the Street), Sur tous les serveurs (All Over the Servers) et le Chœur des gars inconnus (Chorus of Random Dudes). Sur un rythme staccato, leur dialogue assemble des matériaux – parfois « inexactement cités », comme le précise Isabelle Pauwels – extraits de la correspondance d’un client avec Bijou Steal, le scénario d’une pièce de théâtre antérieure, des vidéos fétichistes, des annonces de condo à vendre ou à louer, des actualités municipales, la politique culturelle provinciale, Internet en général, ainsi que du matériel original produit par l’artiste.

La pratique artistique de Pauwels s’attache à l’écoute du discours de la culture contemporaine, en disséquant et en rapiéçant ce babillage dans le but de défier l’apathie des spectateurs.trices qui absorbent tout ce qui émane de la publicité, de la politique et de la pornographie. Pauwels déconstruit et réexpose les formes de subjectivité prescrites au spectateur.trice-consommateur.trice dans l’économie du capitalisme, de la sexualité et de l’industrie, ou sur la « superautoroute de l’information », ainsi qu’elle la qualifie. Elle évoque le langage grossier et sensationnaliste du web : « Aucune inscription requise ! Adhésion gratuite ! Aucune arnaque ! Votre femme ne le découvrira jamais ! » (« No Sign Up! Free Join! No Bullshit! Your Wife Will Never Find Out! ») Ces subjectivités superficielles sont dévoilées et la normalisation de leur autorité est ainsi contestée à travers les représentations hyperboliques et isolées. Ces expériences sont révélées dans leur complexité, mettant en lumière comment elles ont un impact sur les relations humaines, à la fois personnelles et professionnelles, ou comment elles affectent l’environnement urbain de leur intervention. La mise en scène de cette cacophonie alterne entre le paysage urbain de New Westminster, en Colombie-Britannique, et le paysage numérique d’Internet, où les échanges sont voilés par des noms d’usagers.ères et des interfaces. À travers ce vaste récit de la désindustrialisation et du tournant vers Internet, Pauwels combine les sujets embrouillés des médias, du peuple, de la sexualité et du désir.

CG

EXPLOREZ

  • La dynamique du langage et du pouvoir mise en place par la correspondance, la sollicitation et le commerce en ligne.
  • Remarquez comment les voix sont nouées au texte écrit. Comment peut-on comparer l’usage du texte chez Pauwels aux légendes de Lake ou aux énoncés de Boisjoly ?

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS

Pakasaar, Helga ed. Isabelle Pauwels. North Vancouver, BC : Presentation House Gallery, 2013.

Isabelle Pauwels, LIKE…/AND, LIKE/YOU KNOW/TOTALLY/RIGHT (2012) <https://vimeo.com/104551659>

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Krista Belle Stewart

Krista Belle Stewart est connue pour sa capacité à faire ressortir la complexité de documents d’archives qui permettent à la fois l’intimité, la coïncidence et une rencontre intemporelle de récits à travers les époques. Travaillant avec la vidéo, la photographie, le design, des matières éphémères et des tissus, Stewart franchit le fossé existant entre les récits personnels et institutionnels par une médiation transparente. Son travail a été exposé à l’International Studio and Curatorial Program (ISCP) de Brooklyn, au Plug In Institute of Contemporary Art de Winnipeg, à la Vancouver Art Gallery, à la Presentation House Gallery de North Vancouver, à la Contemporary Art Gallery de Vancouver et chez Mercer Union, à Toronto. Stewart détient une maîtrise en beaux-arts (MFA) du Bard College de New York. Elle est membre de la Upper Nicola Band de la Nation Okanagan et vit actuellement à Vancouver, en Colombie-Britannique.

OEUVRE

Seraphine, Seraphine, 2014
Vidéo, son, 38 min 57 s
Édition 1/5

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Achat, 2017 (017.08)

La vidéo Seraphine, Seraphine de Krista Belle Stewart juxtapose deux sources qui portent sur la vie et l’expérience de sa mère, Seraphine Ned Stewart. À gauche de l’écran, on peut voir des extraits d’un docufiction de la CBC réalisé en 1967 qui relatent la formation de Seraphine en vue de devenir la première infirmière autochtone en santé publique de Colombie-Britannique, tandis qu’à droite défilent des passages de son témoignage à la Commission de vérité et de réconciliation du Canada à Vancouver en 2013. Par cette alternance du récit et du témoignage, Stewart suscite un mode de visionnement en parallèle qui maintient l’attention sur les manières dont l’expérience vécue, le trauma intergénérationnel et la complicité coloniale sont rapportés, passés sous silence ou reconnus, ainsi que sur les conditions de leur présentation et les modes d’écoute à travers ces cadres de pensée ou entre eux.

« Est-ce que ce sont les questions que vous alliez poser ? Sinon, je peux partir d’un autre lieu. » (« Were those the questions you were going to ask? Otherwise, I can start from somewhere else. ») S’adressant au rapporteur de témoignage de la Commission, situé hors-champ, au tout début de son témoignage vidéo, Seraphine répond à quelques questions avant de déclarer que les termes et le lieu de son témoignage prennent leur origine ailleurs. À la gauche, se déroule en parallèle une séquence de la production de la CBC montrant son arrivée en train à Vancouver. À droite, Seraphine se penche pour ramasser des papiers, regarde vers le bas et se prépare à prendre la parole, avant que la vidéo disparaisse, laissant le docufiction en noir et blanc défiler seul. Lorsque le témoignage de droite revient, Seraphine est en train de parler de ses parents et de ses grands-parents, de la manière dont les pensionnats ont détruit le mode de vie traditionnel et des conséquences de cette situation dans sa famille.

Puisque cette œuvre positionne le.la spectateur.rice entre deux sources, cette question de partir ou de parler à partir d’un autre lieu est cruciale. « Qui parle » devient alors une question de savoir d’où parle la personne qui parle. Où un énoncé trouve-t-il sa source? La réorientation qu’effectue Seraphine de la forme et du sens de son témoignage trouve un écho dans la déconstruction que fait sa fille de la structure de la production de la CBC et de la vidéo de la Commission. Comme le révèle la structure de la vidéo de Stewart, le fait de partir d’un autre lieu, de traverser les cadres du temps, entre récit et témoignage, ne consiste pas nécessairement à combler tous les silences, mais plutôt à stimuler l’écoute, l’analyse et la compréhension du lieu et de l’effet de ces brèches.

RS

EXPLOREZ

  • Quels contre-récits émergent du montage conjoint de deux vidéos issues de deux initiatives gouvernementales, un organisme de diffusion national et une commission d’enquête nationale ?
  • Examinez, par exemple, le passage où Seraphine est interrogée et pressée de répondre, à la fois dans le docufiction et dans son témoignage à la Commission. Comment ces questions sont-elles formulées ? Quelle forme de réponse est attendue ?

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS

Krista Belle Stewart en conversation avec Dory Nason, Western Front, Vancouver, 2015 <https://front.bc.ca/events/krista-belle-stewart-in-conversation-with-dory-nason/>

Willard, Tania. « Rules for Disorder ». Mice Magazine 1 (2016). <http://micemagazine.ca/issue-one/rules-disorder>

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Ian Wallace

Ian Wallace (né 1943, Shoreham, UK) vit et travaille à Vancouver. Ses expositions solo incluent : Ian Wallace: Collected Works, Rennie Collection at Wing Sang, Vancouver (2017); Abstract Paintings I-XII (The Financial District), Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa (2015); Ian Wallace: At the Intersection of Painting and Photography, Vancouver Art Gallery (2012); The Economy of the Image, The Power Plant, Toronto (2010); A Literature of Images, Kunsthalle Zurich, Witte de With Center for Contemporary Art, Rotterdam, et Kunstverein für die Rheinlande und Westfalen, Dusseldorf (2008); The Clayoquot Protest (August 9, 1993), Presentation House Gallery, North Vancouver, Sprengel Museum, Hannover, et Staatliche Kunstsammlungen, Dresden (1995-1998); Ian Wallace: Selected Works, 1970-1987, Vancouver Art Gallery (exposition itinérante au et à New York, 1988–1989); et Work 1979, Vancouver Art Gallery (1979). Ses expositions collectives incluent : Recto Verso, Fondazione Prada, Milan (2015); Many Places at Once, CCA Wattis Institute for Contemporary Arts, San Francisco (2014); Traffic: Conceptual Art in Canada 1965-1980, Vancouver Art Gallery (2012); Exhibition, Exhibition, Castello di Rivoli Museo d’Arte Contemporanea, Turin (2010); UN COUP DE DÉS: Writing Turned Image. An Alphabet of Pensive Language, Generali Foundation, Vienna (2008); Les Peintres de la vie moderne, Musée national d’art moderne, Paris (2006); Intertidal: Vancouver Art and Artists, Museum van Hedendaagse Kunst Antwerpen (2005); Jede Fotografie ein Bild, Pinakothek der Moderne, Munich (2004); Oh cet écho ! (Duchampiana) 2, Musée d’art moderne et contemporain, Geneva; Notion of Conflict, Stedelijk Museum, Amsterdam (1995); Recent Acquisitions, Museum of Modern Art, New York (1995); Recent Acquisitions, Museum of Contemporary Art, Los Angeles (1991). Wallace est decorée de la Chevalier de l’Ordre des Artes et des Lettres (2014); Officier de l’Ordre du Canada (2013); la Médaille du Jubilé d’or de Sa Majesté la Reine Elizabeth II (2013); et le Prix du Gouverneur général pour les arts visuels (2004). Il est representé par Catriona Jeffries, à Vancouver, Jessica Silverman, à San Francisco, Galerie Greta Meert, à Brussels, et Hauser & Wirth, à London, New York, et Zurich.

OEUVRES

Magazine Piece Schema, 1970
Encre sur vélin, 62 x 102 cm
#25 d’une édition illimitée

Collection de la Galerie Leonard & Bina Ellen, Université Concordia
Achat, 2017 (017.03)

Magazine Piece (Time Magazine, 18 décembre 2017), 1970-2018
Pages de magazine, ruban adhésif, 207 x 225 cm

Magazine Piece (Look, 9 février 1971), 1970-2018
Pages de magazine, ruban adhésif, 140 x 331 cm

Existant dans la collection de la galerie en tant que schéma pouvant être interprété librement par chaque installateur.trice, Magazine Piece est une œuvre conceptuelle qui emprunte son médium à la presse de diffusion massive. Lors des premières expositions de l’œuvre, Wallace a lui-même sélectionné des revues d’intérêt général exprimant le zeitgeist politique et culturel du moment, alors que les interprétations curatoriales ultérieures ont davantage exploité des sujets de niche liés aux mondes de l’art et de la mode, ainsi qu’à la culture technologique, médiatique et du loisir.

Le magazine Look et l’œuvre Magazine Piece ont une longue histoire commune. L’artiste a d’abord conçu l’œuvre dans son atelier en utilisant le numéro du 18 novembre 1969, qui comprenait un article sur le film à paraître Zabriskie Point de Michelangelo Antonioni traitant de la contre-culture. Il l’a ensuite exposée pour la première fois avec l’édition du 15 mai 1970 couvrant la fusillade de l’université d’État de Kent. À l’occasion de la première présentation de Magazine Piece à Montréal, dans le cadre de l’exposition 45°30′ N-73°36’ W au Centre des arts Saidye Bronfman et aux Sir George Williams Art Galleries (rebaptisées Galerie Leonard & Bina Ellen), les commissaires Gary Coward et Bill Vazan ont utilisé le numéro du 9 février 1971. Cette même publication est reprise ici, faisant simultanément référence à l’histoire de l’œuvre et à celle de la galerie. Du point de vue actuel, la couverture, le contenu et les publicités de Look agissent comme un repoussoir historique à l’expérience des regardeurs.ses. En effet les similitudes sont grandes entre l’incomprise génération « Moi » (Me decade) des années 19701 et la culture des « milléniaux » d’aujourd’hui : la question des « politiques identitaires » atteint à nouveau des sommets dans les discussions, les dégradations environnementales reflètent toujours la menace imminente d’une crise énergétique, le mouvement #Idle No More – Jamais plus l’inaction que construit l’activisme actuel des Autochtones d’Amérique et les préoccupations économiques de la mondialisation néolibérale d’aujourd’hui rappellent la période d’inflation, de récession, de stratification économique, de « désindustrialisation » et des « derniers jours de la classe ouvrière2 » d’alors.

Dans le cadre de l’exposition Qui parle ? / Who Speaks?, il a semblé approprié de renouveler le choix de la revue pour sa pertinence sociale et politique et de présenter une seconde version de l’œuvre en utilisant un récent numéro de TIME sur les personnalités de l’actualité et les « briseurs.ses de silence » qui se sont prononcé.e.s contre la culture d’abus sexuels. Cette couverture médiatique de la quatrième vague techno-féministe a déclenché, dans la conscience publique, des discussions sur les notions de consentement et d’abus de pouvoir. En conséquence, l’utilisation du numéro « Personnalité de l’année » (Person of the Year) du magazine TIME donne la parole à une multitude de voix et présente une application féministe élargie du schéma conceptuel de l’artiste masculin.

CG

  1. Tom Wolfe, « The ‘Me’ Decade and the Third Great Awakening », New York Magazine, 23 août 1976, p. 26-40.
  2. Jefferson Cowie, Stayin’ Alive: The 1970s and the Last Days of the Working Class, New York, The New Press, 2010 [traduction libre].

EXPLOREZ

  • Alors que Magazine Piece Schema propose une méthode pour étudier un magazine imprimé en le considérant comme un système, une obstruction affecte ce processus, car on ne peut voir qu’un seul côté des pages. Comment tenez-vous compte de ces pertes et de ces interruptions dans votre perception de l’œuvre et dans l’analyse du magazine ?
  • Imaginez comment cette œuvre pourrait être prolongée par une publication numérique. Quelles caractéristiques de la publication imprimée seraient perdues ? Est-ce que le mur de la galerie et une version papier seraient nécessaires ou faudrait-il un autre type de support et un autre espace pour en assurer la réalisation ?

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS

Wallace, Ian. Ian Wallace: At the Intersection of Painting and Photography. Vancouver : Vancouver Art Gallery, 2012. Voir aussi le site web de l’exposition <http://projects.vanartgallery.bc.ca/wallace/>

Conférence de Ian Wallace, Vancouver Art Gallery, 15 janvier 2013 <https://vimeo.com/61529521>

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