SIGHTINGS 2022-2024
SEE FEVER
Inauguré en 2012 à l’occasion du 50e anniversaire de la collection permanente de la Galerie Leonard & Bina Ellen, le programme d’expositions satellites SIGHTINGS a été conçu comme une plateforme d’expérimentation et de réflexion critique afin de questionner les possibilités et les limites de l’espace du « cube blanc » moderniste. Ce programme est associé à un module de présentation cubique situé dans un espace public de l’université que des artistes et des commissaires sont invité·e·s à investir en proposant de nouvelles stratégies de monstration artistique.
Cet automne, la Galerie lance un cycle pluriannuel axé sur la thématique SEE FEVER. L’expression renvoie au désir fiévreux de « tout voir », à l’attrait pour les stratégies visant à voir « plus » ou « plus loin » et les contextes offrant un champ de vision élargi et déstabilisant nos mécanismes perceptifs. En écho à cette thématique, le cube SIGHTINGS est appréhendé comme une plateforme d’observation surélevée dont les quatre parois transparentes permettent une vue à angle de 360 degrés. Ainsi, les projets de la programmation s’intéresseront à l’expérience perceptive et psychique du sujet regardant qui dispose d’une vue à grand angle, à la quête de la vue panoramique et de l’horizon fuyant, et aux dispositifs et appareils d’optique permettant d’augmenter, d’améliorer et de désorienter la logique spatiale de la vision.
SIGHTINGS est situé au rez-de-chaussée du Pavillon Hall : 1455, boul. De Maisonneuve Ouest, et est accessible tous les jours de 7 h à 23 h. Le programme est élaboré par Julia Eilers Smith.
Parfaite empathie
Parfaite empathie est une installation qui s’étend sur 116 jours et consiste en une projection se reflétant sur elle-même. À l’intérieur du cube, un long diaporama fait lentement défiler une série d’images dédoublées. L’intensité de la projection fluctue en fonction de la luminosité du lieu. Elle débute au mois de janvier, avec ses journées courtes et sombres, puis s’estompe peu à peu au fil du printemps, suivant l’augmentation de l’ensoleillement.
L’œuvre de Melanson emploie fréquemment le dédoublement, les jeux de miroirs et la désorientation pour attirer notre attention sur les frontières brouillées entre les corps, les objets et l’espace. Parfaite empathie met en jeu la frustration de désirer ce qui se trouve juste au-delà de notre atteinte, car la durée et la portée de l’œuvre la rendent presque impossible à saisir en entier.
Dans le cube, un appareil réfléchissant nous montre – l’une après l’autre et à intervalles irréguliers – des images de fauteuils ergonomiques se trouvant dans des espaces liminaires. Melanson s’adonne à une création de sens par association avec des objets trouvés et des images du quotidien – ici, une vaste collection de photographies de chaises de bureau en état de suspension, dans l’attente qu’on s’y assoie. Leur forme anticipe leur occupation par un corps, tout en dictant le type de travail que pourrait accomplir ce corps une fois assis.
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allô
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c’est campus ?
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ami a dit de peut-être jeter un œil
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venir ici je viens ici et très souvent
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parce que c’est sur mon chemin du retour vers
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du travail et je suis venue ici pour faire du
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dessin et du modèle vivant parce que
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les muscles du monsieur muscles
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les muscles de la femme sont si si si
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expressifs attends deux secondes
regarde la différence entre
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passion plein de joie de colère et
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tu sens que c’est l’homme
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qu’il profite de sa vie au maximum
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il l’a vécue ou il a vécu sa vie
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avec une émotion totale
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le désir la colère la lutte
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c’est tellement expressif quand tu
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tu veux faire des dessins et du modèle
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vivant viens ici pour voir
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exagérer mais c’est ça ça
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magnifie la force du corps humain ça
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dévoile absolument tout
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mille fois et tu te rends compte
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tout ce que tu peux faire c’est te lier à
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une personne pour la vie
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intelligence intuition et sentiment
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changement valorisant âge et expérience tu
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surpasses pas les portes tu les
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atteins en vieillissant
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je n’y avais jamais pensé comme ça
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chaque fois que je venais
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ici j’étais déroutée et je sentais pas
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de lien je pouvais pas m’identifier
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à tout ça mais toi si tu mets
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de côté la peur et tu restes là
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souvent on voit de l’art on sent que c’est
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différent ou on sent le décalage
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entre nous-mêmes et l’œuvre d’art
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et si tu t’éloignais et tu repoussais cette
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peur et tu imaginais que c’est
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pour toi c’est juste là devant toi
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pour que tu marches dedans et à travers
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la lutte un jour ils ont défié la
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lutte
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ils souffrent pour trouver
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la vérité universelle ou les outils
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Pour trouver quelque chose à exprimer eux-mêmes
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n’aie pas peur de l’art il est là pour toi
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on passe tous par là
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je ne connais pas
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l’œuvre mais je laisse mon imagination
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et mes pensées courir des
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bébés de la terre encore attachés à maman et
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ils commencent à grimper et grimper grimper jusqu’à
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ce qu’ils deviennent un doute et forment eux-mêmes
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leur propre raisonnement leur propre génération
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définie par toutes ces
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difficultés et toutes ces tortures à
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temps
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jusqu’à ce que l’autre soit l’amour il y a tant
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d’émotions dans tout ça l’amour des
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hommes et des femmes et le sacrifice
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je lutte tant de choses que je
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comprends pas je comprends pas la
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langue mais c’est sûr que ce que tu peux
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voir c’est la lutte je me souviens j’ai
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Une lutte différente
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regarde amuse-toi à les voir c’est si
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expressif pour ce corps imagine-toi
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quelle œuvre d’art merveilleuse merveilleuse
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et pourtant quand il s’agit du
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désarroi inévitable devant l’incapacité de
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sa propre langue et sa culture à partager
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les révélations que j’ai eues
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ils ne manquent jamais jamais de nous impressionner
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regarde-les sous la pluie ou quand le
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soleil d’hiver est bas ils sont baignés d’une
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lumière différente le soir vus d’en bas
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Je suis venue parfois au coucher de soleil et quand
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quand c’est l’heure du crépuscule cet
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endroit est généralement
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vide de monde ici un
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endroit solennel et sacré peut-être que je
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reviendrai le soir et ferai de la
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lecture sur cet enfer
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terrestre mais peu importe comment je le conçois
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peu importe mon savoir limité sur le sujet c’est
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une œuvre très impressionnante et puissante
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et avant de savoir avant d’en apprendre
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sur elle j’ai plus de liberté pour la chanter
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à ma manière c’est ce qu’il y a de bien
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dans le fait de voir parfois tu vois de l’art
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et tu vois l’explication ça t’aide
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à comprendre mais en même temps
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ça bloque un peu ton imagination ou
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ton chant est guidé et si tu
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ne faisais que regarder une œuvre et utiliser
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ton propre cerveau ta propre imagination
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ta propre logique pour voir
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va dans un musée fais juste regarder et
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pense par toi-même sans être guidé·e par les autres
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aie une pensée autonome tu m’entends
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désolée je sais pas si le son est
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est correct ou pas mais j’aime bien les matins
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comme ça je pense que j’en referai je pense
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je viendrai ici plus souvent c’est c’est
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très inspirant
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au moins regarder de belles
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choses regarder la nature regarder
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les tentatives humaines de faire du monde
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un endroit de faire de l’endroit
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quelque chose qui nous plaît qui nous fait
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penser est un endroit très très très
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c’est un endroit très très agréable un endroit
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puissant pour la pensée
Traduit par Luba Markovskaia
Parfaite empathie est une installation qui s’étend sur 116 jours et consiste en une projection se reflétant sur elle-même. À l’intérieur du cube, un long diaporama fait lentement défiler une série d’images dédoublées. L’intensité de la projection fluctue en fonction de la luminosité du lieu. Elle débute au mois de janvier, avec ses journées courtes et sombres, puis s’estompe peu à peu au fil du printemps, suivant l’augmentation de l’ensoleillement.
L’œuvre de Melanson emploie fréquemment le dédoublement, les jeux de miroirs et la désorientation pour attirer notre attention sur les frontières brouillées entre les corps, les objets et l’espace. Parfaite empathie met en jeu la frustration de désirer ce qui se trouve juste au-delà de notre atteinte, car la durée et la portée de l’œuvre la rendent presque impossible à saisir en entier.
Dans le cube, un appareil réfléchissant nous montre – l’une après l’autre et à intervalles irréguliers – des images de fauteuils ergonomiques se trouvant dans des espaces liminaires. Melanson s’adonne à une création de sens par association avec des objets trouvés et des images du quotidien – ici, une vaste collection de photographies de chaises de bureau en état de suspension, dans l’attente qu’on s’y assoie. Leur forme anticipe leur occupation par un corps, tout en dictant le type de travail que pourrait accomplir ce corps une fois assis.
Alli Melanson vit et travaille à Tiohtià:ke (Montréal). Elle détient une maîtrise en beaux-arts de l’Université Concordia et un baccalauréat en beaux-arts de l’Université OCAD. En 2023, elle a présenté des expositions individuelles à Joe Project, Chris Andrews et 100 Bell Towers, et a participé à des expositions de groupe chez Franz Kaka et à la Galerie Leonard & Bina Ellen.
L’artiste tient à remercier Julia Eilers Smith, Hugues Dugas, Andrew Hoekstra et Paras Vijan.