L’histoire de peuples autochtones performant devant des publics internationaux et coloniaux constitue une part importante de l’art autochtone en général et de l’art de la performance en particulier. Dès les premières années de contact, les performeurs autochtones, connus sous le nom d’« Indiens », étaient confrontés à l’épineux problème de préserver leurs pratiques culturelles traditionnelles en les performant sur scène, tout en s’assurant que cette performance réponde aux désirs de l’imaginaire colonial. Ces performances avaient lieu dans le contexte de politiques coloniales d’assimilation et d’assujettissement1. L’exposition Actes de souveraineté II prend pour point de départ l’idée que les interprètes étaient conscients de la façon dont ils étaient considérés et qu’ils travaillaient de concert avec les attentes de leur auditoire, se façonnant par là même un avenir et une identité propres malgré les contraintes rencontrées sur chaque scène. Dans Actes de souveraineté II, les artistes Rebecca Belmore, Lori Blondeau, Dayna Danger, Robert Houle, James Luna, Shelley Niro, Adrian Stimson et Jeff Thomas confrontent l’héritage des représentations coloniales ainsi que celui de la performance culturelle en utilisant une variété de stratégies esthétiques telles que la reconstitution, le remixage, la commémoration, l’imitation, la parodie, la mascarade et le portrait. Ces artistes reviennent sur l’histoire de la mise en scène de l’« Indien » et ses difficultés intrinsèques afin de réhabiliter le performeur effacé et objectivé en tant qu’ancêtre, artiste et sujet autochtone. Ce faisant, ils tentent de comprendre leur propre relation à la culture de la performance dans un contexte d’art actuel, retournant souvent le regard vers le public et rendant visibles les désirs coloniaux qui sous-tendent l’imaginaire colonial. Enfin, certains de ces artistes utilisent la performance elle-même comme point d’entrée dans la réécriture des récits historiques coloniaux d’un point de vue autochtone. L’exposition vise à éclairer les œuvres des artistes en tant qu’actes « performatifs » qui négocient les attentes autant qu’ils représentent la culture et l’identité. Il est important de noter que la représentation de la culture autochtone inclut des aspects de la culture contemporaine, et non seulement de la culture pré-contact de l’imaginaire colonial. Les actes autochtones de mise en œuvre suivent le chemin tracé par les interprètes autochtones du passé afin de présenter des représentations négociées et hautement conscientes de la culture et/ou de l’identité.
– Wanda Nanibush
- Au sujet de la politique indienne canadienne, voir J.R. Miller, dir., Sweet Promises : A Reader on Indian-White Relations in Canada (Toronto, University of Toronto Press, 1991). Au sujet de la politique indienne états-unienne, voir Vine Deloria, dir., American Indian Policy in the Twentieth Century (Norman, University of Oklahoma Press, 1985).
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FermerL’intégralité de l’essai écrit par la commissaire de l’exposition Wanda Nanibush peut être lue et téléchargée dans la section Textes et documents de ce site. Une version imprimée est également disponible en galerie.
Produit avec l’appui du Frederick and Mary Kay Lowy Art Education Fund.
COMMISSAIRE
Wanda Nanibush est une « guerrière des mots et des images » Anishinaabe-kwe de la Première Nation Beausoleil. Elle est actuellement conservatrice adjointe de l’art canadien et indigène au Musée des beaux-arts de l’Ontario. Elle détient une maitrise en études visuelles de l’Université de Toronto. Elle enseigne l’histoire, la politique et l’art aux cycles supérieurs à l’Université de Toronto. Nanibush réside à Toronto.
FermerARTISTES ET ŒUVRES
Rebecca Belmore est une artiste multidisciplinaire de Montréal et une membre de la Première Nation du Lac Seul à Frenchman’s Head, en Ontario. Elle a étudié à l’Université de l’École d’art et de design de l’Ontario (OCAD University), à Toronto, et son art centré sur la performance et l’installation est reconnu internationalement. Depuis 1987, son travail multidisciplinaire a abordé l’histoire, le lieu et l’identité à travers les médiums de la sculpture, de l’installation, de la vidéo et de la performance. Belmore a été la représentante officielle du Canada à la Biennale de Venise en 2005. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions, à la fois sur le plan national et sur le plan international, incluant deux expositions individuelles mises en circulation : The Named and the Unnamed, à la Morris and Helen Belkin Art Gallery de Vancouver (2002), et 33 Pieces, à la Blackwood Gallery de l’Université de Toronto à Mississauga (2001). Elle a obtenu le prestigieux prix VIVA 2004 de la Fondation Jack et Doris Shadbolt, ainsi que le Prix en arts visuels de la Fondation Hnatyshyn en 2009.
ŒUVRE
In a Wilderness Garden, 2012
Installation vidéo à 3 canaux
4 min 20 s ; 10 min ; 44 min s
Avec l’aimable concours de l’artiste
Les jardins « sauvages » anglais coordonnaient des conceptions de la nature hautement stylisées et idéalisées. Alliant des végétations poussant de façon supposément informelle avec des enclos délimités par des haies minutieusement taillées, ces espaces servaient à la mise en scène de fantasmes pastoraux et coloniaux. Dans son installation vidéo, Rebecca Belmore se penche sur un événement survenu au 18e siècle, quand un homme Mi’kmaq nommé Silmoodawa (Silmutewey) a été forcé de jouer le « sauvage » dans un jardin en France. Endossant son rôle assigné avec malice, l’homme le poussa aux limites de la bienséance française : il chassa, tua et prépara un chevreuil, puis couronna sa performance en déféquant devant son public. Interprétant cet acte comme une œuvre fondatrice de l’art de la performance, Belmore l’a réinvesti dans son histoire, d’abord avec une performance au Centre Banff, en Alberta, en 1997, et ici avec une installation vidéo. Sur l’écran gauche, on la voit courant à travers les bois avec ses mains attachées derrière son dos et creusant dans les feuilles tombées et dans la terre. Au centre, une figure enveloppée dans une couverture et se tenant droite arrive au coin d’une haie de jardins haute et épaisse.
EXPLOREZ
- Considérez l’histoire et le rôle des jardins sauvages ou romantiques comme extension du projet colonial ou comme dépositaire et scène pour l’imaginaire colonial.
- Réfléchissez à des états de clôture et d’encerclement. Comment Belmore trace-t-elle les limites du jardin ? Comment la résistance peut-elle mettre de l’avant – creusant le sol, la figure recouverte faisant face à la haie –, repousser et diminuer l’échelle du jardin afin qu’il n’encercle plus, mais qu’il soit, en fait, encerclé ?
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Site web de l’artiste <http://www.rebeccabelmore.com/>
Nanibush, Wanda. Entretien avec Rebecca Belmore. Decolonization: Indigeneity, Education & Society 3, no. 1 (2014) : 213-217. <decolonization.org/index.php/des/article/download/21311/17377>
Simpson, Leanne. « Canada Day, Rebecca Belmore, and me ». 2 juillet 2012.
<http://leannesimpson.ca/canada-day-rebecca-belmore-me/>
Augaitis, Daina et Kathleen Ritter. Rebecca Belmore: Rising to the Occasion. Vancouver: Vancouver Art Gallery, 2008.
Bailey, Jann et al. Rebecca Belmore: Fountain. Vancouver : Morris and Helen Belkin Art Gallery, 2005. Imprimé.
Enright, Robert. « The Poetics of History: An Interview with Rebecca Belmore. » Border Crossings 24, no. 3 (2005).
FermerLori Blondeau est une artiste et commissaire Cri/Saulteaux/Métis, qui travaille à Saskatoon. Elle est cofondatrice et directrice actuelle de TRIBE, un des organismes artistiques autochtones les plus innovateurs et les plus intéressants au Canada. Les performances, les photographies et les œuvres médiatiques de Blondeau ont été présentées au Canada et internationalement. Elle termine actuellement un doctorat en Études interdisciplinaires à l’Université de Saskatchewan. Elle a collaboré avec l’artiste James Luna à une série d’installations et à une performance intitulée Dead Fall Revue (2000). Le travail de Blondeau explore l’influence des médias et de la culture populaire (contemporaine et historique) sur l’identité personnelle, l’image de soi et la définition de soi chez les peuples autochtones. Les personnages de performance qu’elle crée évoquent les dommages créés par le colonialisme ainsi que le plaisir ironique du déplacement et de la résistance. Son œuvre actuelle se constitue d’une série de performances basées sur la mémoire et le chez-soi, le déplacement et la décolonisation. En 2006, l’exposition individuelle Grace de Blondeau a été présentée à la Mendel Art Gallery de Saskatoon. L’artiste a également participé avec Shelley Niro au Requickening Project, qui fut présenté en 2007 à la Biennale de Venise. Récemment, la galerie Urban Shaman de Winnipeg a présenté Asiniy Iskwew (2016), un survol de son œuvre à ce jour.
ŒUVRES
Asiniy Iskwew, 2016
Épreuves numériques à jet d’encre
Avec l’aimable concours de l’artiste
Adrian Stimson & Lori Blondeau
Putting the Wild back into the West, 2004-2010
10 épreuves numériques à jet d’encre
Avec l’aimable concours des artistes
Un exercice d’élargissement du genre du portrait, Asiniy Iskwew montre Blondeau portant une robe rouge longue et fluide, se tenant au sommet de quatre formations rocheuses autochtones situées dans les Plaines entre le Canada et les États-Unis. Ces sites aux fonctions variées agissent comme des archives historiques et culturelles, les incarnent, et servent par ailleurs de ressources spirituelles et médicinales. La recherche de Blondeau sur ces sites provient de sa propre relation à l’absence relativement récente de Mistaseni, une roche de quatre cents tonnes détenant une importance spirituelle pour les peuples cri et assiniboine du Saskatchewan, qui fut dynamitée en 1966 pour accommoder l’inondation du réservoir du lac Diefenbaker. Blondeau se tient solide et droite, les roches sous ses pieds, le tissu rouge de sa robe tombant en cascade sur les surfaces des roches ; prises sans considération des frontières coloniales, les photographies de Blondeau maintiennent et renforcent les liens autochtones avec la terre.
EXPLOREZ
- Compte tenu de l’arrangement formel des photographies : l’orientation portrait, la figure seule et l’emplacement. En gardant en tête la signification du lieu, explorez les façons dont Blondeau élargit ou accentue la pratique du portrait.
- Les façons dont les photographies de Blondeau agissent en tant que documents et affirmations de résilience. En quoi l’archive photographique correspond-elle à la valeur des sites photographiés, eux-mêmes marqueurs d’événements historiques ou sites et sources de spiritualité ?
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Blondeau, Lori. Lori Blondeau: Who do you think you are? : Performance, Installation, Documentation, 1996-2007. Mendel Art Gallery, 2009.
Bell, Lynne. « Scandalous Personas, Difficult Knowledge, Restless Images ». Canadian Art, hiver 2004. <http://canadianart.ca/features/lori-blondeau-belle-sauvage/>
Taunton, Carla. « Lori Blondeau: High-Tech Storytelling for Social Change ». Mémoire de maîtrise, Université Carleton, 2006.
<https://curve.carleton.ca/system/files/etd/2265a301-8ab8-4b38-9f7e-7f8f486a4d4c/etd_pdf/bde2e318701af5f368025231d45fac99/taunton-loriblondeauhightechstorytellingforsocial.pdf>
Dayna Danger est une artiste émergente queer, Métis/Ojibway/Polonaise, qui a grandi à Winnipeg. Elle vit présentement à Montréal, ou elle a complété des études en arts visuels à l’Université Concordia.
Par l’utilisation de la photographie, de la sculpture et de la vidéo, la pratique de Danger questionne la limite entre l’émancipation et l’objectification en réclamant l’espace au moyen d’un travail à échelle humaine. Elle s’approprie le langage visuel de la mode et de la pornographie pour détourner et remettre en question les perceptions du pouvoir, du genre, de la performativité, de la représentation, de la sexualité et des identités plurielles.
ŒUVRES
Adrienne, 2017
Lindsay & Sasha, 2017
Kandace, 2016
Épreuves numériques
Avec l’aimable concours de l’artiste
Trois masques, 2016, 2016, 2017
Cuir et broderie de perles
Avec l’aimable concours de l’artiste
Conjuguant, dans ses masques, le travail du cuir, le jeu BDSM et le perlage autochtone, Dayna Danger participe à ce que l’écrivain Cherokee Qwo-Li Driskill appelle un « érotisme souverain », qui émerge de la reconnaissance que l’hétéropatriarcat et les normes de genre sont à la base du projet colonial, et que ce système dépend de la perpétuation de l’objectivation sexualisée et de la violence sur les corps autochtones. Par conséquent, les positionnements, pratiques et critiques queer doivent engager et soutenir des processus menant à la décolonisation. Dans ces confrontations et interruptions, l’érotisme souverain est tout d’abord un moyen de reprendre possession de son propre corps, de prendre soin de soi et de mettre en œuvre l’engagement mutuel de ces processus, indépendamment de la normativité coloniale, que celle-ci provienne de l’extérieur ou qu’elle soit internalisée dans les communautés queer. En perlant ses masques, Danger entrelace la culture déviante avec la politique et le soin de la décolonisation.
EXPLOREZ
- Les masques exposés en tant qu’objets. Comment la rencontre entre le perlage, le travail du cuir et le BDSM perturbe-t-elle (domine-t-elle) les désirs ethnographiques coloniaux ?
- Les masques comme faisant partie d’une pratique qui consiste à prendre soin de soi. Les principes de la culture de la déviance – consentement, protocole et communication, autodétermination et jeu de rôles – et la façon dont ils correspondent aux pensées et actions féministes et décoloniales.
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Site web de l’artiste <http://www.daynadanger.com/>
Profil Tea & Bannock <https://teaandbannock.com/tag/dayna-danger/>
FermerLes multiples inventions de l’Américain Thomas Alva Edison (11 février 1847 – 18 octobre 1931) touchent les télécommunications, l’électricité et le stockage de l’énergie, l’enregistrement sonore, le cinéma et les technologies d’extraction des ressources. Détenant 1 093 brevets et ayant créé, au cours de sa vie, plus de 300 compagnies, il est à l’origine des premiers laboratoires de recherche industrielle et a rationalisé, dans le processus de production, le passage de la recherche au développement et à la commercialisation.
ŒUVRE
Ghost dance, 1894
Film 35 mm noir et blanc transféré sur vidéo, 21 s
Alors qu’ils performaient à Brooklyn, New York, à l’été et à l’automne 1894, des membres du Wild West Show de Buffalo Bill visitèrent le studio Black Maria de Thomas Edison à West Orange, dans le New Jersey, le premier studio de cinéma aux États-Unis. Des membres Sioux Lakota de la troupe y interprétèrent une version de la Danse des Esprits devant la caméra Kinetographe d’Edison, assurant ainsi l’une des premières archives filmiques d’une performance autochtone. Danse exécutée en cercle qui émergea de la résistance récente des Lakota à l’assimilation, la Danse des Esprits avait été interdite à partir de 1890, la même année que le meurtre de Sitting Bull et le massacre à Wounded Knee.
EXPLOREZ
- En tenant compte des interdictions sociales et légales de la culture et de la performance autochtones, considérez les façons dont les interprètes utilisent la permissivité du spectacle de Buffalo Bill pour documenter une affirmation de résistance religieuse et politique.
- En riposte au paradigme du sauvetage, selon lequel le film est interprété comme une archive d’une culture mourante, pensez aux possibilités qu’entraînent la circulation et la reproduction de ce document.
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Ghost Dance à la Bibliothèque du Congrès <https://www.loc.gov/item/00694139/>
DeMallie, Raymond J. « The Lakota Ghost Dance: An Ethnohistorical Account ». Pacific Historical Review 51, no 4 (1982) : 385-405.
Salgala, Sandra K. « Edison and Cody ». Buffalo Bill on the Silver Screen: The Films of William F. Cody: A Digital Companion. <http://www.codystudies.org/sagala/edisoncody.php>
Mooney, James. The ghost-dance religion and the Sioux outbreak of 1890. 1896.<https://archive.org/details/ghostdancesioux00moonrich>
FermerRobert Houle est un artiste Anishinaabe, commissaire et professeur. Il est membre de la Première Nation de Sandy Bay, au Manitoba. Il vit et travaille à Toronto. Depuis le début des années 1970, Houle a participé à de nombreuses expositions individuelles et de groupe, internationales et nationales, dont : l’installation multimédia Paris/Ojibwa au Centre culturel canadien de Paris; Indians from A to Z et Sovereignty over Subjectivity à la Winnipeg Art Gallery; Anishnabe Walker Court, une intervention au Musée des beaux-arts de l’Ontario, à Toronto, et Troubling Abstractions à la Robert McLaughlin Art Gallery et au McMaster Museum of Art. Houle a publié de nombreux essais et monographies sur d’importants artistes contemporains indigènes et des Premières Nations d’Amérique. Son apport remarquable en tant qu’artiste, commissaire, essayiste, éducateur et théoricien de la culture a été récompensé par l’attribution des prix suivants : le Janet Braide Memorial Award for Excellence in Canadian Art History en 1993, le Eiteljorg Fellowship en 2003 et une résidence de création à Paris du Programme de résidences internationales du Conseil des arts du Canada. Récemment, Houle est revenu à l’Université de l’École d’art et de design de l’Ontario pour donner des cours sur l’abstraction des peuples autochtones à la Faculté des arts.
ŒUVRES
Shaman Never Die, 2015
Shaman Dream in Colour, 2015
Shaman Heals by Touching, 2015
Huile sur toile
Avec l’aimable concours de l’artiste et de Kinsman Robinson Galleries, Toronto
Parcourir la pratique artistique de Houle signifie suivre un chemin variable le long de convergences d’abstraction et de figuration, où se rencontrent documents historiques, mémoires personnelles et langage déclaratif. Dans ses premiers tableaux, tels Parfleches of the Last Supper (1983) ou The Place Where God Lives (1989), Houle employait l’abstraction gestuelle pour réfléchir aux enchevêtrements de croyances et de traditions chrétiennes et autochtones. Plus tard, dans son installation multimédia Paris/Ojibwa (2010), Houle a construit un salon du 19e siècle dans les murs lambrissés desquels quatre portraits étaient encastrés. Chaque portrait présentait un personnage vu de dos, regardant vers l’horizon, avec des touches de pinceau colorées montant ou descendant vers le haut de leur tête. Comme détails de l’installation, ils portaient chacun un titre – Danseur, Guérisseur, Shaman, Guerrier – et à la base de chacun d’eux est accroché un petit tableau abstrait de la variole. L’installation revient sur l’incident d’une troupe de danseurs ojibwé, menés par le conférencier et interprète Maungwudaus, qui voyagea à Paris pour performer devant le roi et un grand public. Le point de départ de Mississauga Portraits (2012) est un daguerréotype pris à Chicago peu après le retour de la troupe. Houle a extrait trois portraits de la photo de groupe : Maungwudaus, sa deuxième épouse Hannah, et Waubuddick.
Telle que présentée ici, la série de shamans de Houle mélange fluidement son vocabulaire abstrait et sa pratique du portrait pour révéler des personnages qualifiés par leur capacité à rêver en couleurs, guérir par le toucher, et ne jamais mourir. Son travail au pinceau fixe des motifs et des effets que l’on retrouve à travers l’ensemble de son œuvre, d’une croix qui alterne entre un symbole religieux et une étoile, à des lavis monochromes et des petits coups animés qui se tordent et se retournent sur la surface des tableaux.
EXPLOREZ
- Les détails formels et leurs variations, les différentes façons dont la figuration est atteinte dans ces trois œuvres.
- Les éléments ou qualités liés aux figures. Ceux qui contribuent à l’abstraction. Ceux dont l’emplacement et le rôle sont indéterminés.
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Houle, Robert. Robert Houle: Indians from A to Z. Winnipeg : Winnipeg Art Gallery, 1990.
Houle, Robert et Shirley Madill. Robert Houle: Sovereignty over Subjectivity. Winnipeg : Winnipeg Art Gallery, 1999.
Houle, Robert, Nelcya Delanoė, Barry Ace, et David W. McIntosh. Paris/Ojibwa. Peterborough : Peterborough Art Gallery, 2011.
Nanibush, Wanda. Compte-rendu de Contamination and Reclamation: Robert Houle’s Paris/Ojibwa, Canadian Cultural Centre, Paris, 13 avril – 10 séptembre, 2010. Fuse Magazine, 29 décembre 2010. <http://fusemagazine.org/2010/12/96>
FermerL’artiste de performance et d’installation James Luna (Puyukitchum/Luiseno) réside dans la réserve indienne La Jolla située dans le comté de San Diego, en Californie. Depuis 1975, on lui a consacré plus de 41 expositions individuelles, il a participé à 85 expositions de groupe et a réalisé des performances sur le plan international dans plusieurs lieux, dont le Museum of Modern Art (NYC), le Whitney Museum of American Art, le New Museum of Art, le San Francisco Museum of Art, le Museum of Contemporary Art de San Diego, le Los Angeles County Museum of Art, le Musée des beaux-arts du Canada et le Museum of Contemporary Native Art de Santa Fe, au Nouveau-Mexique. Il a reçu plusieurs bourses et prix tout au long de sa carrière. En 2005, tout particulièrement, il a été le premier à être choisi comme artiste commandité par le Smithsonian’s National Museum of the American Indian afin de participer à la 51e Biennale de Venise de 2005, en Italie. En 2012, un doctorat honorifique en lettres (Humanities) a été remis à James Luna par le Institute of American Indian Arts, à Santa Fe, au Nouveau-Mexique.
ŒUVRES
In My Room, 2016
Installation vidéo avec appareil d’imitation de flamme, bûches et roches
Vidéo : 2 min 17 s, couleur, son
Avec l’aimable concours de l’artiste
Ishi Speaks, 2011
Épreuves numériques à jet d’encre
Avec l’aimable concours de l’artiste
Avec un écran fixé au mur et un faux feu de camp à proximité, In My Room de Luna met en scène une rencontre de rituels domestiques et cérémoniels, avec pour trame sonore la chanson In My Room (Dans ma chambre) des Beach Boys. Dans cette vidéo, on peut voir Luna préparer une cérémonie de la « hutte à sudation », accompagnée par l’hymne à la solitude de Brian Wilson chanté sur un ton quasi monotone :
Il y a un monde où je peux aller et à qui raconter mes secrets
Dans ma chambre, dans ma chambre
Dans ce monde, j’enferme dehors toutes mes inquiétudes et mes peurs
Dans ma chambre, dans ma chambre
Je rêve et je complote
Je reste éveillé et je prie
Je pleure et je soupire
Je ris des jours passés
Maintenant il fait noir et je suis seul
Mais je n’aurai pas peur
Dans ma chambre, dans ma chambre
Dans ma chambre, dans ma chambre
Dans ma chambre, dans ma chambre
En fusionnant l’image typiquement états-unienne de la culture du surf de la Californie présentée par les Beach Boys avec le rituel autochtone, Luna se penche sur ses deux cultures et sur la banalité d’avoir parfois simplement besoin d’un peu de temps et d’espace à soi.
Avec son trio de photographies Ishi Speaks, Luna spécule sur les pensées et sentiments d’Ishi, un homme yahi qui est entré dans le village d’Oroville en Californie, en 1911. Identifié par un anthropologue comme le dernier survivant de sa tribu, le cinquantenaire Ishi a été déplacé au campus de l’Université de Californie à Berkeley. Là, il a vécu dans un appartement à l’intérieur du Musée d’anthropologie, où il a été étudié comme spécimen vivant et a travaillé comme assistant de recherche.
Considérant le traitement d’Ishi comme objet d’étude, les attributions faites en son nom (y compris son nom, donné par l’anthropologue Alfred Kroeber) et les mauvaises communications pendant ces rencontres, Luna intervient dans le cadre ethnographique pour articuler ce qui n’a peut-être pas été dit, entendu ou clairement compris.
EXPLOREZ
- La pratique de Luna consistant à revêtir le rôle du sujet ethnographique afin de le retourner contre la logique et le regard coloniaux.
- Comment Luna redirige et réclame la culture populaire.
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Smith, Paul Chatt. « Luna remembers. » James Luna: Emendatio. National Museum of the American Indian, 2005. Imprimé. <http://www.paulchaatsmith.com/luna-remembers.html>
Townsend-Gault, Charlotte, « Rebecca Belmore and James Luna on Location at Venice: The Allegorical Indian Redux. » Art History 29, no. 4 (2006) : 721-755. Imprimé. <belkin.ubc.ca/file_download/36/Townsend-Gault+Belmore+and+Luna.pdf>
FermerShelley Niro est membre de la Réserve des Six Nations, Mohawk de la baie de Quinte, du clan de la Tortue. Elle est née en 1954 à Niagara Falls, dans l’État de New York, et elle vit à Brantford, en Ontario. Elle a obtenu un baccalauréat en arts visuels avec distinction de l’Université de l’École d’art et de design de l’Ontario et une maîtrise en arts visuels de l’University of Western Ontario. En 2001, elle a été lauréate d’une bourse Eiteljorg du Museum of Western and Indian Arts, en Indiana. En 2003, Niro a participé à la « Women in The Director’s Chair Program » au Centre des arts de Banff. À l’automne 2006, Niro a été sélectionnée pour être associée avec Women in Film et GM Accelerator Grants. En 2012, elle fut la première à recevoir le prix du Conseil des arts de l’Ontario pour les arts autochtones. On peut voir les œuvres de Niro au Musée canadien de la civilisation, au Québec, au Musée des beaux-arts du Canada, au Musée canadien de la photographie contemporaine, au Musée du portrait du Canada, à Ottawa, au Rockwell Museum of Western Art, à Corning, dans l’État de New York, à la University of Seattle Library, ainsi qu’au National Museum of the American Indian, à Washington, DC.
ŒUVRES
The 500 Year Itch, 1992
Épreuve gélatino-argentique coloriée à la main, épreuve gélatino-argentique sépia et épreuve gélatino-argentique
Avec l’aimable concours du Woodland Cultural Centre, Brantford, Ontario
The Iroquois Is a Highly Developed Matriarchal Society, 1991
Épreuves gélatino-argentiques coloriées à la main
Avec l’aimable concours de l’artiste
Abnormally Aboriginal, 2013
Photographies sur toile
Avec l’aimable concours de l’artiste
Dans 500 Year Itch, Niro utilise la mascarade et l’appropriation afin d’aborder les stéréotypes et les limites appliqués aux rôles que les femmes autochtones peuvent jouer. Revêtant le rôle de Marilyn Monroe dans le film The Seven Year Itch (1955 ; Sept ans de réflexion), Niro utilise la scène iconique pour livrer une critique mordante et humoristique du colonialisme, jalonnée par le cinq-centenaire du débarquement de Christophe Colomb. Délogeant la personnalité médiatique de Monroe en tant que figure normative de la féminité blanche, Niro révèle la place de la culture populaire dans l’identité autochtone et amorce un acte de solidarité et de résistance féministes, partageant la personne de Monroe au-delà de l’icône, qui fraternisa et correspondit avec les queers, les intellectuels, les Juifs et les Communistes dans l’Amérique de la Guerre froide.
Dans The Iroquois Is a Highly Developed Matriarchal Society, Niro prend une phrase qui seule pourrait être lue comme une conclusion anthropologique distanciée et l’ouvre au côté intime et quotidien de la vie d’une femme mohawk qui lui est le plus proche. Ayant photographié sa mère assise derrière un séchoir à cheveux dans sa cuisine, elle introduit dans ce trio de portraits une nuance et un contexte personnels à un énoncé qui pourrait autrement être reçu comme une généralisation facile.
Prenant la forme d’un triptyque, Abnormally Aboriginal est un autoportrait de l’artiste portant trois chandails noirs. Chaque chandail est décoré d’une illustration montrant un brin d’ADN. De gauche à droite, les portraits examinent les façons dont les systèmes d’identification et de catégorisation sont construits au moyen de diverses combinaisons de langage et d’images.
EXPLOREZ
- Comment Niro utilise la répétition, l’étonnement et les jeux de mots afin de réinvestir et de briser l’autorité des images iconiques ou des déclarations autoritaires.
- Son utilisation de la culture populaire et vernaculaire pour revendiquer et affirmer le quotidien de la vie et de la culture mohawk, en particulier l’expérience des et entre femmes.
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Site web de l’artiste <http://www.shelleyniro.ca/>
The Shirt, 2003 <http://www.isuma.tv/imaginenative/shirt>
Abbott, Larry. Entretien avec Shelly Niro. A Time of Visions. <http://www.britesites.com/native_artist_interviews/sniro.htm>
Podedworny, Carol. Entretien avec Shelly Niro. Mohawks In Beehives + Other Works, Toronto : Mercer Union, 1992. <http://www.mercerunion.org/exhibitions/mohawks-in-beehives-other-work/>
FermerAdrian A. Stimson est un artiste interdisciplinaire membre de la Nation Siksika (Blackfoot) du Sud de l’Alberta, où il vit. Il a exposé et performé sur la scène nationale et internationale. Ses recherches portent sur l’identité, la métaphysique, les personnes bispirituelles, l’écologie, l’esprit et les modalités de guérison au cœur de la pratique artistique. Il a participé, en tant qu’artiste, au Programme d’art des Forces canadiennes et a voyagé avec les Forces canadiennes à Kandahar et à Masum Ghar en Afghanistan. Ses nombreuses expositions individuelles et collectives incluent : If we never met au Pātaka Art + Museum de Porirua, en Nouvelle-Zélande, With Secrecy and Despatch au Campbelltown Arts Centre, en Nouvelle-Galles du Sud, en Australie, et au Indigenous Contemporary Art de Londres, au Royaume-Uni, ainsi que Buffalo Boy’s Let Them Eat Pie, au festival Nuit Blanche de Saskatoon. Ses œuvres font partie des collections du Mackenzie Art Gallery de Regina, du Glenbow Museum de Calgary et du British Museum de Londres, au Royaume-Uni. Après l’obtention de son baccalauréat en arts visuels au Alberta College of Art and Design de Calgary, Stimson a ensuite complété une maîtrise en arts visuels à l’Université de Saskatchewan, à Saskatoon, où il a vécu pendant treize ans. On lui a attribué le Blackfoot Visual Arts Award, la Médaille du jubilé de la Reine Elizabeth II en 2003 ainsi que la Médaille du centenaire de l’Alberta en 2005 pour ses activités de défense des droits humains et de la diversité dans plusieurs communautés.
ŒUVRES
Buffalo Boy Shaman Exterminator, 2005
Épreuve numérique à jet d’encre
Avec l’aimable concours de l’artiste
Onward Upward, 2005
Épreuves numériques à jet d’encre sur papier d’archive, lettrage en vinyle
Avec l’aimable concours de l’artiste
Sketches of Indian Life, 2005
Épreuves numériques à jet d’encre sur papier d’archive, lettrage vinyle
Avec l’aimable concours de l’artiste
Buffalo Boy’s Wild West Peep Show, 2007
Installation vidéo à 4 canaux, affiche
North 1 min 28 s; Don’t Look East 7 min 26 s; Sacred South 8 min 56 s; Wild West 2 min 34 s
Avec l’aimable concours de l’artiste
Adrian Stimson & Lori Blondeau
Putting the Wild back into the West, 2004-2010
10 épreuves numériques à jet d’encre
Avec l’aimable concours des artistes
Dans l’œuvre de Stimson, l’identité est construite au moyen d’une distribution de personnages toujours changeants et se chevauchant. Parmi les personnages récurrents, on retrouve Buffalo Boy, The Shaman Exterminator et The Lord of the Plain. La queeritude est fondamentale chez ces personnages qui se présentent tous à travers une combinaison de résistance, de « camp » et de travestissement. L’installation vidéo à quatre canaux Buffalo Boy’s Wild West Peep Show présente un survol à la hauteur de l’entrejambe de Buffalo Boy, une parodie de Buffalo Bill qui en brouille les genres, depuis ses exploits le long des canaux de Venise jusqu’au aux plaines salées de la Death Valley – affublé de la tenue requise faite de peaux de bisons, bas de soie et colliers de perles, Dans Onward Upward, Stimson joue le rôle d’un prêtre anglican portant des bas résille et des talons hauts, parlant de son expérience dans les écoles résidentielles et de l’hypocrisie de leurs acteurs principaux. De même, Sketches of Indian Life présente un Buffalo Boy aux yeux écarquillés, aux cheveux tressés, avec un chapeau de cowboy décoré de paillettes accroché à côté d’un tableau noir, et levant les yeux du livre du révérend Canon Frost, Sketches of Indian Life, publié en 1904. Dans Putting the WILD back into the WEST, Buffalo Boy rejoint Belle Sauvage, la contribution de Lori Blondeau à un monde polymorphe inversé de vaudeville, de saloons et de fusillades. Stimson utilise le « camp » pour déstabiliser et rendre mouvants les récits coloniaux, dans une queeritude de l’histoire qui amorce autant qu’elle est motivée par les processus d’acceptation de soi, de connaissance de soi et de guérison.
EXPLOREZ
- Comment les personnages de Stimson occupent, déstabilisent et décloisonnent les constructions coloniales d’identités autochtones et coloniales.
- En vous vous accroupissant pour voir le « peep show » de Stimson, considérez comment cette pose façonne votre rôle de voyeur et comment elle s’apparente effrontément aux dispositifs à visionnage unique sur lesquels les premiers films d’Edison étaient distribués.
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Site web de l’artiste <http://adrianstimson.com/home.html>
Bell, Lynne. « Adrian Stimson: Buffalo Boy at Burning Man. » Canadian Art, Été 2007, 44-48. Web. <https://canadianart.ca/features/buffalo_boy/>
Rice, Ryan et Carla Taunton. « Buffalo Boy: THEN AND NOW. » Fuse Magazine, vol. 32, no. 2 (2009) : 18-25. Imprimé. Reimprimé dans INDIANacts: Aboriginal Performance Art, Grunt Gallery. <http://indianacts.gruntarchives.org/essay-buffalo-boy-then-and-now-rice-and-taunton.html>
Stimson, Adrian. Buffalo Boy’s Heart On: Buffalo Boy’s 100 Years of Wearing His Heart On His Sleeve. Mémoire de maîtrise. Université de la Saskatchewan, 2005. <http://library2.usask.ca/theses/available/etd-12202005-115924/unrestricted/BBfinaldocopy.pdf>
FermerJeff Thomas est un artiste et commissaire Onondaga de la Confédération des Six Nations. Né à Buffalo, dans l’État de New York, en 1956, il vit et travaille à Ottawa, en Ontario. Son travail photographique soulève la question des stéréotypes raciaux et de l’incompréhension mutuelle à travers des références aux récits, aux symboles et à l’actualité de l’expérience urbaine autochtone. Depuis 1979, il a participé à de nombreuses expositions. En 2010, le Centre culturel canadien a présenté Unmasking: Arthur Renwick, Adrian Stimson, Jeff Thomas, qui faisait partie de la biennale d’arts visuels Photoquai, organisée par le Musée du Quai Branly, à Paris. Parmi ses expositions individuelles récentes, on retrouve les suivantes : Mapping Iroquoia: Cold City Frieze, au McMaster Museum of Art de Hamilton, en Ontario (2012), Father’s Day, à la galerie Urban Shaman de Winnipeg, au Manitoba (2012), Resistance Is NOT Futile, à la Stephen Bulger Gallery de Toronto, en Ontario (2013), et A Necessary Fiction: My Conversation with Nicholas de Grandmaison à la University of Lethbridge Art Gallery, en Alberta (2015). Les expositions dont il est commissaire sont des projets de recherche et des manifestations d’engagement communautaire concernant les réclamations territoriales, l’histoire des pensionnats autochtones et l’histoire de l’art autochtone. Jeff Thomas est représenté par la Stephen Bulger Gallery de Toronto.
ŒUVRES
Shoots the Crow, Lakota, Bismarck, North Dakota, 1995
Get Up and Dance: Ron Good Eagle, Comanche/Osage/Sac & Fox, 1995
The Powwow Suitcase, 1982
Amos Keye, Haudenosaunee (Iroquois), 1982
Richard Poafpybitty (Pink Panther), Comanche/Omaha, 1983
Turtle Powwow, Niagara Falls, New York, 1983
Épreuves pigmentaires sur papier d’archive
Avec l’aimable concours de l’artiste
La série Strong Hearts de Jeff Thomas, une composante d’un projet photographique plus large intitulé Fieldwork, documente des événements pow-wow ayant eu lieu du début des années quatre-vingt au milieu des années quatre-vingt-dix. Interrompant le contrat entre la photographie et le regard ethnographique, Thomas explore les nuances d’autoreprésentation quand la caméra est entre les mains d’artistes autochtones. La clé de l’œuvre réside dans le sens qu’a Thomas de la présence et l’immédiateté des danseurs dans le contexte du pow-wow. Alors que la mise en scène coloniale isolait ses sujets dans le studio ou intervenait sur le terrain en imposant et en arrangeant vêtements, objets et personnes, Thomas se concentre ici sur l’activité se déroulant à l’arrière-plan : la préparation des danseurs et les façons dont ils se présentent à sa caméra.
EXPLOREZ
- Comparez la documentation de Thomas au film d’Edison. Considérez la conservation de la culture traditionnelle, qu’elle soit performée sur une scène, où elle est encadrée par le désir colonial, ou à un pow-wow mené par des autochtones.
- Les moments précédant la performance, les préparatifs des danseurs, leurs ornements et leur maquillage et l’activité autour d’eux.
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
Site web de l’artiste <http://jeff-thomas.ca/>
Hill, Richard W. et Jeff Thomas. Jeff Thomas: A Study of Indian-ness. Toronto : Gallery 44, 2004. <http://jeff-thomas.ca/publication-docs/the-study-indianness.pdf>
Payne, Carol et Jeff Thomas. « Aboriginal Interventions into the Photographic Archives: A Dialogue between Carol Payne and Jeffrey Thomas ». Visual Resources, 18 (2002) : 109-125. <http://jeff-thomas.ca/publication-docs/aboriginal-interventions-into-the-photographic-archive.pdf>
FermerEXPLOREZ
- Comme spectacle. Comment la performance peut, au moyen d’outils temporaux, spatiaux et vocaux, devenir un site changeable de négociation des prescriptions des désirs et violences coloniaux et d’intervention au sein de celles-ci.
- Du soi. Comment l’identité est régulée par les catégories normatives de race, de genre et de sexualité. Comment ces normes sont renforcées par la répétition et le rituel. En quoi le respect des limites de ces constructions sociales est nécessaire afin de prendre part à la société dominante et de paraître cohérent à l’intérieur de celle-ci. Comment, en appréhendant la performativité de l’identité, ces mêmes règles et rôles, ainsi que le système qu’ils sous-tendent, peuvent être troublés, examinés et interrompus.
- Qu’arrive-t-il quand les récits historiques coloniaux ou les descriptions culturelles sont lus comme des allégories ? Y a-t-il un autre récit, un autre ensemble d’idées que l’on pourrait trouver aux côtés de ce qui est écrit, dit, vu ou performé ? Quelles sont les fictions et les présupposés jusque là occultés qui surgissent alors ?
- L’allégorie comme forme autoréflexive de fiction, de représentation et de performance. Comme façon d’ouvrir les récits et les rôles à la contingence, aux voix multiples afin de supplanter l’autorité d’une voix ou d’une histoire unique.
- Comment les artistes dans cette exposition occupent, exposent et refusent le personnage de l’« Indien » inventé ou imaginaire.
- La notion de survivance, introduite dans le contexte autochtone par l’écrivain et chercheur anishinaabe Gerald Vizenor, comprend les actes et affirmations de l’incontestable présence et continuité des peuples autochtones et de leur culture. Elle est guidée par le rejet des mythes coloniaux de disparition, de primitivisme et de victimitude autochtones. Dans un contexte nationaliste québécois, « la survivance » désigne l’endurance de la culture francophone et le tracé des contours d’un État indépendant suivant des caractéristiques socioculturelles. Jacques Derrida, pour sa part, a décrit la survivance à différents moments comme une présence spectrale, l’inscription de projets politiques et culturels passés ayant une vie posthume ou un statut semblable à celui d’une relique, puis il a déplacé l’accent sur la vitalité ou l’excès d’idées et d’actes apparemment refoulés ou tombés en désuétude. Pour Gerald Vizenor, la clé est le suffixe « ance ». Plutôt que « survie », qui dénote un état de manque et de quasi-absence, « survivance » indique une action, un processus et une prolifération.
- L’ironie comme stratégie-clé de survivance, au sens où elle peut interrompre les récits coloniaux en exposant la domination comme une simulation et revendiquer des résultats au-delà des conclusions imposées des récits coloniaux. Comment l’ironie est-elle employée par les artistes dans cette exposition ?
- Plutôt que de simplement souligner les contradictions de la construction coloniale de l’indianité et de maintenir un binarisme exclusif (soit l’un soit l’autre), de quelles manières les artistes réunis dans cette exposition identifient-ils l’anxiété et le désir coloniaux, et comment exploitent-ils l’instabilité des représentations et des rôles que ceux-ci tentent d’assigner ?
- Comment la sexualité est colonisée. Comment la mise en vigueur des normes genrées, le contrôle des corps et la violence sexualisée constituent des éléments fondateurs du colonialisme.
- Comment la souveraineté peut être incarnée. Comment l’érotisme peut constituer une forme de connaissance en correspondance avec la tradition, la communauté, l’ancestralité et le territoire.