Du 14 mars au 19 avril 2008, la Galerie Leonard et Bina Ellen présente l’exposition This is Montréal!, un projet intégrant d’importantes œuvres modernistes de sa collection (peintures, dessins et sculptures de Marcel Barbeau, Yves Gaucher, Denis Juneau, Guido Molinari, Françoise Sullivan et Claude Tousignant) ainsi que d’autres œuvres rarement présentées des années 60 et 70, notamment une importante installation textile de Nancy Herbert. Ces œuvres sont des composantes dans un récit qui entend cartographier le Montréal des rêves d’enfance d’Andrew Hunter, qui la visita au début des années 70. Le cosmopolitisme et la modernité de Montréal contrastaient avec la demeure modeste de Hunter à Hamilton en Ontario. À partir d’un vague modèle du musée moderne, de la foire commerciale et de l’exposition universelle, Hunter crée un récit visuel et textuel personnel de la ville et de son iconographie par l’intermédiaire des œuvres de la collection, ainsi que divers photos, assemblages, sculptures et mobiliers. This is Montréal! est une articulation manifestement lacunaire, mais néanmoins convaincante, de l’idée d’un lieu entrevu et imaginé par un étranger.
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- les notions de vision et de mémoire et les stratégies employées pour leur donner corps, les rendant ainsi tangibles;
- comment la disposition et la méthode de présentation des oeuvres et des divers objets et artefacts créent un dialogue entre les éléments constituant cette exposition;
- l’idée de collection et sa mise en pratique, et considérez les différentes façons dont elles se concrétisent dans cette exposition;
- le contexte historique, à la fois à Montréal et au Québec, qui a mené à la tenue d’Expo 67;
- l’art du récit dans This is Montréal!
QUELQUES QUESTIONS
- Comment Andrew Hunter aborde-t-il les notions de réalité et de fiction dans cette exposition? Ces notions sont-elles importantes en ce qui a trait à la pratique et à l’activité du commissaire
- Quel rôle jouent, dans cette exposition, les oeuvres historiques choisies dans la collection de la galerie?
- Quel lien peut-on établir entre cette exposition et la publication qui l’accompagne? Ont-elles un propos différent l’une de l’autre? En quoi l’exposition et la publication participent-elles conjointement à l’évolution du discours qui sous-tend ce projet?
- À quel type de public s’adresse cette exposition? Y a-t-il des différences entre ce public et celui généralement visé par les musées et les galeries, et si oui, quelles sont-elles?
- Qu’est-ce qui se bâtit dans cette exposition, et comment?
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Commissaire : Andrew Hunter
Exposition produite par la Galerie Leonard & Bina Ellen.
LE commissaire
Artiste, auteur et commissaire, Andrew Hunter a réalisé des expositions, des projets in sitù, des publications et des essais pour plusieurs institutions au Canada, notamment le Musée des beaux-arts du Canada, le Musée des beaux-arts de l’Ontario et la Vancouver Art Gallery. Sa démarche, marquée par l’histoire populaire, complexifie les récits autorisés et remet en question les idées reçues. Hunter s’intéresse particulièrement au collections publiques et aux archives ainsi qu’au collections particulières, qu’il repense en fonction de divers trajectoires narratifs. Selon Hunter, This is Montréal! « reflète une volonté de dépasser les articulations didactiques et académiques d’une collection pour explorer les failles de la mémoire, exploiter les possibilités créatives de l’erreur, et reconnaître que nos idées sur le « réel » sont en grande partie des constructions imaginaires. »
Andrew Hunter est à la direction de RENDER, un centre de présentation et de recherche expérimentales en art et en enseignement à l’Université de Waterloo, en Ontario.
FermerEnfant, j’ai grandi dans une modeste banlieue ordinaire des années 50 à Hamilton, en Ontario; l’idée que je me faisais de Montréal s’est surtout formée à partir d’images (et encore, à partir d’un choix d’images très limité et contradictoire). Autant que je m’en souvienne, et sur la foi des quelques artefacts que j’ai conservés de mon enfance, les sources de ces images sont les suivantes :
- The Official Souvenir Book for Expo 67 et une brochure d’accompagnement pour enfants, intitulée Tell me about Expo.
- Un numéro de National Geographic (vol. 131, n° 5, mai 1967).
- Deux livres d’Andy O’Brien sur les Canadiens de Montréal.
- Une brochure touristique de la compagnie de taxis Murray Hill Ltd. de Montréal (vers 1950).
- Le film de l’ONF intitulé La Lutte de Michel Brault, Claude Fournier, Claude Jutra et Marcel Carrière, 1961.
Quelle était l’idée que je me faisais de Montréal ? Essentiellement, celle d’une ville vaste et extrêmement moderne qui était beaucoup plus branchée sur le monde (et sur l’avenir) que ma ville natale. Le fait que Montréal (à l’époque) était plus grande que Toronto me plaisait énormément. Et de toute évidence, elle était plus mondaine. Même l’équipe d’hockey de Montréal me semblait plus mondaine, plus rapide et plus progressiste que l’équipe locale qu’encourageaient mes amis et que mon père surnommait les Maple « Laughs ». À travers les éléments ci-haut mentionnés, des images fugaces sur la CBC et les rares occasions où je voyais les Canadiens de Montréal à la soirée du hockey, je me suis formée une vision personnelle d’un environnement quasi utopique, dont il subsiste encore quelques traces.
Ma première véritable expérience de la ville de Montréal remonte au début des années 70 lorsque ma famille rendit brièvement visite à « tante » Marilyn (une amie proche de mes parents plutôt qu’une parente). Notre séjour a peut-être duré un jour, voire même un après-midi, mais je sais qu’il fut bref. Nous avons visité les vestiges de l’Expo 67, nous sommes allés au restaurant (non loin de l’Université McGill) et nous avons passé du temps dans son appartement. Je garde le souvenir d’un endroit très moderne avec ses peintures et tapisseries, ses meubles suédois et son tapis à longs poils. Cette visite en coup de vent ne fit que confirmer ma vision de la ville.
This is Montréal! entend cartographier le Montréal de mes rêves d’enfance, et reconstituer le portrait fragmentaire d’une ville que je n’ai jamais vraiment connue. À partir d’un vague modèle du musée moderne, de la foire commerciale et de l’exposition universelle, j’ai tenté d’articuler une idée, manifestement viciée, mais néanmoins convaincante, d’un lieu entrevu et imaginé par un étranger (idée à la fois naïve et trompeuse, et faisant écho, dans ce dernier cas, au récit de Marco Polo dans Les Villes invisibles d’Italo Calvino). Le titre du projet s’inspire de publications touristiques des années 60.
Les œuvres de la collection que j’ai choisies évoquent traduisent à la fois mes souvenirs et les idées de modernité que j’associais avec Montréal (ceci est particulièrement vrai pour les œuvres d’artistes comme Denis Juneau, Yves Gaucher et Gerald Gladstone), ainsi que des liens très précis avec des individus et des événements. J’ai également inclus dans l’exposition une œuvre problématique, une abstraction sans titre de Guy Robert, qui ne fait pas partie de la collection de la galerie, mais qui a été entreposée dans la réserve depuis plusieurs années. De provenance incertaine, l’œuvre est légèrement endommagée et dans un état précaire. (D’où venait elle, et où aboutira-t-elle?) Elle traduit l’esprit de mon projet, et incarne le même mélange de résonances personnelles et d’idéaux étiolés, retrouvé dans les instantanés de l’Expo 67 présentés dans cette exposition.
La figure imparfaite et souvent troublée qui existe en marge de la société, ou qui observe de l’extérieur par le biais de fragments ou des pensées des autres, est depuis longtemps une caractéristique constante de mon travail. De plus, This is Montréal! reflète mon intérêt pour les fixations modernistes sur la planification et l’industrie utopiques, et pour les idées de vérité dans le cadre du contexte muséal et du processus historique. La stratégie particulière de commissariat mise en œuvre ici reflète une volonté de dépasser les articulations didactiques et académiques d’une collection pour explorer les failles de la mémoire, exploiter les possibilités créatives de l’erreur, et reconnaître que nos idées sur le « réel » sont en grande partie des constructions imaginaires.
FermerLES ŒUVRES
Richard Lacroix
Pointe à diamant III, 1968, sérigraphie
Rita Letendre
In Space, 1969, sérigraphie
Guido Molinari
sans titre, 1965, sérigraphie
Robert Savoie
Perforation 0.2, 1969, sérigraphie
Gordon Appelbe Smith
Orange Square, 1964, sérigraphie
Philip Henry Surrey
Spec’s Grill, 1945, aquarelle, crayon et encre sur papier
Philip Henry Surrey
Hotel Russell, vers 1945, aquarelle, crayon Conte et pastel sur papier
Katie Von Der Ohe
Circle Round About, 1969, sérigraphie
Marcel Barbeau
Rétine prétentieuse, 1965, acrylique sur toile
Yves Gaucher
Danse carrée / Il était un carré, 1965, huile sur toile
Denis Juneau
Des bleus, 1963, huile sur toile
Serge Lemoyne
Pointe d’étoile, 1972, huile sur toile
Jean McEwen
La folie conduisant l’amour #2, 1967, acrylique sur toile
John Miller
No. 5, n. d., acrylique sur panneau dur
Guido Molinari
Espace bleu No. 2, 1962, huile sur toile
Claude Tousignant
Stocastique VxBxMxR, 1965, huile sur toile
Zbigniew Blazeje
Structural 65 #12, 1966, acrylique sur toile, plexiglas, bois
Gerald Gladstone
Hanging Form No. 3, 1963, acier
Nancy Herbert
sans titre, vers 1972, laine et fibres synthétiques
Henry Saxe
Blue-Orange, 1969, vinyle et acier
Gord Smith
Rising Form, 1964, bronze
Françoise Sullivan
sans titre, vers 1973, acrylique
Walter Yarwood
Hidden Place, 1963, bronze
POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS
BALDISSERA, Lisa, Peake’s Folly, Victoria, Art Gallery of Greater Victoria, 2002.
BILLARD, Jules B, « Montreal Greets the World » , National Geographic, mai 1967, p. 600 – 621.
Expo 67 Terre des Hommes, Bibliothèques et Archives Canada, http://www.collectionscanada.gc.ca/expo/05330213_f.html
HUNTER, Andrew, David Poolman, Long Gone Lonesome Blues, London, Museum London, 2005.
HUNTER, Andrew T. The Donnelly Project / Le projet Donnelly. London, Museum London, Charlottetown, Confederation Centre Art Gallery and Museum, 2002.
HUNTER, Andrew T. Peake’s Folly, Victoria, Art Gallery of Greater Victoria, 2002.
HUNTER, Andrew, « Speaking of Billy », The Edge of Everything: Reflections on Curatorial Practice, Catherine Thomas (dir.), Banff, The Banff Centre Press, 2002, p. 25 – 33.
HUNTER, Andrew, Up jumped the Devil, Kitchener, Kitchener-Waterloo Art Gallery, 2005.
Musée THE FAMILY OF MAN, Clervaux, Luxembourg, site Internet official, http://www.family-of-man.public.lu/
O’BRIEN, Andy, Fire-Wagon Hockey, Toronto, The Ryerson Press, 1967.
O’BRIEN, Andy, Rocket Richard, Toronto, Ryerson Press, 1961.
Render, University of Waterloo, site Internet official, http://render.uwaterloo.ca/
STEICHEN, Edward, The Family of Man, New York, Maco Publishing Co Inc., 1955.
THOMAS, Catherine (dir.), The Edge of Everything: Reflections on Curatorial Practice, Banff, The Banff Centre Press, 2002.
VANDENPLAS, Jean et Jacqueline Vandenplas, L’Expo raconté aux enfants, Montréal, Le Centre d’Animation Pastorale – Expo 67, 1963.
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